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Par Robert Dilts

La distinction entre « forme » et « fond » tient au fait que notre perception est bien plus relative qu’absolue. Nos yeux, nos oreilles, notre peau et notre cerveau enregistrent bien plus des changements et des relations dans le monde qui nous entoure, que des quantités absolues. Les personnes parlent par exemple souvent d’une image “lumineuse” ou “distante” comme si ces qualités étaient une qualité stable ou une “chose” associée à une image particulière. En fait une image n’est ni intrinsèquement ” brillante ” ni “sombre”, “colorée” ni “terne”, ” distante ” ni “proche” ; elle est distante, colorée ou lumineuse par rapport à autre chose- comme le fond sur lequel elle se trouve ou par rapport à une autre image. Toutes les formes de perception juxtaposent une “figure” par rapport à un “fond”. Un verre d’eau à température ambiante, par exemple, peut sembler “chaud” comparé à l’intérieur d’un réfrigérateur, mais “frais” comparé à l’intérieur d’un sauna.

Ce qui finit par être “forme” et fond” dépend de nos filtres perceptuels. L’objectif d’une caméra constitue un bon exemple de filtre qui modifie notre perception de la forme et du fond. Lorsque l’objectif est réglé pour faire la mise au point sur des objets proches de nous, les objets éloignés s’estompent et deviennent le “fond”. Lorsque l’objectif est réglé pour faire la mise au point sur des objets éloignés, ceux qui sont plus proches deviennent flous et font partie du “fond”.

Les travaux des psychologues de la gestalt

Le phénomène de la forme et du fond dans la perception a été largement exploré par les psychologues de la gestalt. Un exemple classique est celui d’une image qui soit apparaît comme un calice de couleur claire sur un fond sombre, soit comme deux visages sombres sur un fond clair, selon l’aspect de l’image sur lequel on se concentre en tant que « forme » et en tant que « fond ».

Fond forme2

Cette image peut être vue comme un calice ou deux visages, en fonction de ce qu’est “la forme” et de ce qu’est le “fond”.

Une expérience éclairante démontrant l’impact de la forme et du fond a été réalisée par des psychologues de la gestalt avec des chiens. Les chiens étaient entraînés à s’approcher d’un objet lorsqu’on leur montrait un carré « blanc » et à s’en éloigner lorsqu’on leur montrait une carré « gris ». Une fois que les chiens avaient appris avec succès cette activité particulière de discrimination, les expérimentateurs se sont mis à utiliser le carré “gris” sur un carré à fond “noir”. Les chiens se sont immédiatement mis à s’approcher de l’objet en réponse à la case “grise” (qui avait auparavant déclenché l’évitement), et à éviter l’objet lorsqu’on leur montrait la case noire (qui n’avait été “conditionnée” à rien). Vraisemblablement, plutôt que de percevoir le « gris » comme stimulus absolu, les chiens ont répondu avant tout au rapport le plus profond « plus clair versus plus foncé » par opposition au « gris », « blanc » ou « noir » en tant que « choses ».

Les observations de Pavlov sur les réactions aux “stimuli combinés”

Sur le plan opérationnel, le processus d’avant-plan et arrière-plan est basé sur l’observation par Ivan Pavlov des réactions de son chien aux “stimuli combinés”. Par exemple, à la place de sa célèbre clochette, Pavlov utilisait également une combinaison de sons. Pavlov a par exemple exploré le déclenchement d’une réaction de salivation chez ses animaux, à partir de la combinaison des sons de la cloche avec ceux d’un autre signal sonore et d’un sifflet. 

Pavlov découvrit qu’en combinant des stimuli, l’un des sons semblait pourtant toujours être au premier plan. Supposons qu’il ait conditionné un chien à saliver à l’aide d’une cloche (C), d’un signal sonore (SS) et d’un sifflet (S). Après une période suffisante d’association des trois sons avec une poudre de viande, les sons combinés pouvaient produire dix gouttes de salive.

(C) + (SS) + (S)   10 gouttes de salive

Pavlov découvrit aussi que s’il utilisait la cloche (c) seule, le chien pouvait réagir en produisant huit gouttes de salive. Avec le seul signal sonore (SS), il pouvait obtenir trois ou quatre gouttes de salive. Avec le seul sifflet (S), le chien ne produisait qu’une seule goutte ou ne salivait pas du tout. On pouvait en conclure que la cloche (qui produisait neuf des dix gouttes) était au “premier plan”, et que le sifflet (qui produisait peu ou pas de réponse) était au “second plan”.

(C)  →  8 gouttes  , (SS) → 4 gouttes , (S)    0 gouttes    

Présentés individuellement, certains sons étaient à l’avant-plan, alors que d’autres étaient en arrière-plan

Puis Pavlov  a expérimenté le stimulus “d’arrière-plan” avec plusieurs substances censées faire saliver. Il a par exemple associé le sifflet (S) seul avec un produit acide ou aigre placé dans la bouche du chien. Au lieu que de déclencher la salive, le son du sifflet produisait une suppression de la réponse salivaire.

(S)    suppression de la réponse de salivation 

Pavlov a associé le son “d’arrière-plan” avec  la suppression de la réaction salivaire

Puis Pavlov a essayé de combiner à nouveau tous les sons. De façon surprenante, le chien ne produisait pas du tout de salive. L’effet de la cloche (C) et du signal sonore (SS), qui avaient tous deux produit auparavant une quantité important de salive, a été complètement supprimé. Le sifflet, qui se trouvait à l’origine à l’arrière-plan, est passé complètement au premier plan, écrasant les deux autres stimuli.

C) (SS) (S)  0 gouttes de salive  (suppression de la réponse salivaire)

En combinant de nouveau les sons, l’ancien son “d’arrière-plan” est passé au premier plan et a supprimé tous les autres.

La plupart de nos réponses naturelles sont associées à des “stimuli combinés “. Nous sommes à chaque instant bombardés par une énorme quantité d’informations sensorielles, que nous filtrons en n’en mettant qu’une petite partie au premier plan. Ainsi, lorsque nous réagissons à notre environnement – que ce soit avec anxiété, calme, peur, courage, frustration, joie ou colère – cela signifie que nos filtres perceptifs se sont verrouillés que sur certains aspects de l’expérience, tandis que le reste de l’apport sensoriel passe au second plan. Le processus décrit ci dessous « avant-plan-arrière-plan » met en pratique les découvertes de Pavlov pour transformer les réponses limitantes. On utilise des informations sensorielles de l’expérience qui sont en arrière-plan pour générer une nouvelle réaction, par la “porte arrière” de notre panorama expérientiel.

Certaines techniques PNL modifient les relations entre la forme et le fond

Du point de vue de la PNL systémique, la relation forme-fond crée un processus naturel de recadrage. C’est un moyen puissant de changer la signification ou l’impact des expériences, et de faire émerger de nouvelles perspectives. Par exemple, de nombreuses techniques PNL utilisant les sous-modalités sont efficaces parce qu’elles modifient les relations entre la forme et le fond. La modification de la couleur ou la luminosité de certaines parties d’une image interne peut par exemple positionner cette image au premier plan en tant que “forme” ou la déplacer vers une partie de l’arrière-plan en tant que “fond”.

Des processus tels que le recadrage du contenu et de contexte modifient également dans une certaine mesure les relations entre le fond et la forme en positionnant des comportements ou des expériences dans l’arrière plan de différents cadres contextuels. De même, un certain nombre de schémas linguistiques du Sleight of Mouth (schémas d’influences de Robert Dilts), tels que « Changer la taille du cadre », « Conséquence » et « Hiérarchie des critères », fonctionnent en changeant les relations entre le fond et la forme des expériences de croyances et de création de croyances. Une situation désagréable peut par exemple sembler épouvantable si on la compare à des expériences positives ou à des attentes élevées. La même situation désagréable peut sembler très positive par rapport à une catastrophe du passé ou à une catastrophe potentielle. De même, un événement douloureux peut apparaître comme intense lorsqu’il est perçu à court terme dans le cadre des cinq minutes qui entourent l’événement. Ce même événement douloureux peut sembler presque insignifiant lorsqu’il est perçu dans le contexte de la vie d’une personne.

Les étapes du processus Avant-plan – Arrière-plan

Le processus « avant-plan – arrière-plan » est une méthode développée par Robert Dilts en 1987, pour changer ou reprogrammer des réponses automatiques conditionnées. D’un point de vue conceptuel, la technique repose sur l’utilisation des notions de “forme” et de “fond” de la perception humaine. Nos filtres perceptuels fonctionnent en se concentrant de façon sélective sur certains aspects de notre expérience, comme le fait l’objectif d’une caméra. La signification et l’impact d’une expérience particulière vont dépendre des aspects sur lesquels nous nous concentrons en tant que “forme” et de ce que nous percevons comme étant le “fond”.

1 – Identifier une réponse limitante automatique 

Cette réponse se produit dans un contexte bien défini et peut être testée. 
Exemple : l’anxiété liée au fait de se trouver dans le cabinet du dentiste. 
S’associer à un exemple précis de la réponse limitante au point d’en ressentir les effets physiologiques.

a. Identifier ce qui se trouve au “premier plan” de votre conscience – c’est-à-dire les caractéristiques de l’expérience limitante dont vous êtes le PLUS conscient au moment où elle se produit. 
Exemples : bruits de la roulette du dentiste, conscience de la fréquence cardiaque et de la contraction de la mâchoire. On peut vérifier ici les systèmes de représentation et les sous-modalités des perceptions externes et internes.

b. Identifier des éléments de l’ « arrière-plan », par exemple en trouvant ce dont vous n’êtes pas conscient dans l’expérience et qui n’a aucun rapport direct avec elle. 
Exemples : conscience de la plante des pieds, du lobe de l’oreille, de la couleur des murs.

2- Identifier une situation de contre-exemple à la réponse limitante 

Ce contre exemple est un moment où vous auriez pu ou dû avoir la réponse limitante mais ne l’avez pas eue. La situation de contre exemple est si possible appréciée du sujet.

Exemple : un moment où un ami dentiste a fait la démonstration de son matériel, la tondeuse du coiffeur…etc. Si vous ne trouvez pas de contre-exemple, identifier une expérience qui se rapproche le plus possible de l’expérience limitante, mais dans laquelle il n’y a pas de réponse limitante. S’associer à cette expérience.

a. Identifier les caractéristiques les plus évidentes de cette expérience (avant-plan). Tout en se concentrant sur ces caractéristiques et en vivant l’intensification de la physiologie, établir un point d’ancrage [A1]. 
Exemple : voix intérieure curieuse, image dissociée de tout le bureau.

b. Établir un “fond commun”, c’est-à-dire des caractéristiques qui sont à la fois à l’arrière-plan de l’expérience limitante et du contre-exemple. 
Exemple : conscience de la plante des pieds, des sensations dans les mains, de la couleur des murs.

3 – Créer une forte association entre les éléments d’arrière-plan et d’avant-plan du contre exemple

Cette association concerne donc les éléments commun d’arrière-plan et l’élément d’avant-plan de l’expérience du contre-exemple.
Ceci peut être fait en concentrant votre attention sur la fonction d’arrière-plan, en utilisant l’ancre de ressource [A1] et en faisant par exemple la suggestion suivante. 
“Plus vous faites attention à la plante de vos pieds, plus vous remarquez à quel point cette curieuse voix intérieure devient de plus en plus forte. Et au fur et à mesure que votre conscience se déplace vers la couleur des murs, vous êtes plus facilement en mesure de maintenir une image de l’ensemble du cabinet du dentiste“.

4 – Revenir à l’expérience limitante et se concentrer sur la caractéristique du “fond commun” identifié à l’étape 2b. 

Exemple : “Remettez-vous dans le fauteuil du dentiste du premier souvenir et mettez simplement votre conscience sur la plante de vos pieds, et remarquez la couleur des murs dans ce souvenir”. 
Si cela ne modifie pas la réponse limitante, vous pouvez alors soit identifier un contre-exemple plus puissant ou plus approprié et répéter le processus à partir de l’étape 2a. 
Exemple : faire une prise de sang sans remarquer la douleur, puis remonter à 2b et renforcer l’association entre les “points communs” et les caractéristiques de premier plan du contre-exemple.

5 -Tester en se concentrant sur les caractéristiques de premier plan de l’expérience limitante identifiée à l’étape 1a.

Vous devriez maintenant ressentir la réponse associée à l’expérience du contre-exemple. 
Exemple : “Maintenant, remettez-vous dans le cabinet du dentiste en concentrant toute ton attention sur la hauteur de la fraise, ta mâchoire et ton rythme cardiaque”.

Commentaires

Le processus « Avant-plan – Arrière-plan » est différent des nombreuses techniques utilisant les sous-modalités, tel que le Swish, dans lequel une partie du stimulus qui est le plus au premier plan, la soi-disant “sous-modalité conductrice”, est utilisée pour déclencher l’échange d’une réponse contre une autre.
Le fait de se concentrer sur les éléments de premier plan des deux expérienc et un élément commun d’arrière plan et va créer une sorte de conflit, car les deux expériences luttent pour dominer l’avant-plan de la conscience. Le processus « Avant-plan – Arrière-plan » a une qualité très subtile, presque magique. Le changement dans l’expérience du problème est doux, inconscient et sans effort.

Synthèse du processus « Arriere-plan – Avant-plan » 

1 – Identifier une réponse limitante qui se produit dans un contexte particulier (une réaction allergique, le bruit d’une fraise de dentiste, un ton de voix irritant). 

a ) Calibrer la physiologie associée.

b) Quel est le premier plan ? De quoi le sujet est-il le plus conscient ?


2 – Trouver un contre-exemple approprié pour servir de ressource et un élément qui reste en dehors du champs de conscience du sujet.  

Le contre exemple est un moment où le sujet aurait du avoir une réaction mais ne l’a pas eue, c’est donc un contexte similaire comparable a la situation limitante. 
Quel est le premier plan ? De quoi le sujet est-il le plus conscient ?


L’élément commun à la situation limitante et au contre-exemple est par exemple le contact de la plante des pieds, le poids des vêtements, etc.
Quel est l’arrière-plan de ces deux situations. Ancrez cette caractéristique. 

3 – Créer une forte association entre ce qui est le plus présent dans la conscience (au premier-plan du contre exemple), et quelque chose auquel il ne prête pas attention (à l’arrière-plan des deux situations). 

En maintenant l’ancre, demander au sujet de se concentrer sur ce dont il est le plus conscient dans la situation de contre-exemple. 

4 – Relâcher l’ancre et demandez immédiatement au sujet de retrouver l’expérience limitante précédente et de s’y associer.

Calibrez la réponse physiologique : si la réaction limitante se produit toujours, reprendre l’étape 3 avec un contre-exemple différent et renforcer l’association entre les éléments du premier-plan et de l’arrière-plan. 

5 – Pont sur le futur
Projetez le sujet dans l’avenir en maintenant l’ancre de l’arrière-plan pendant que le sujet pense à des situations du futur. 

Références 

Croyances : Pathways to Health and Well-Being, Dilts, Hallbom, T. & Smith, S., 1990.
The Foreground – Background Process ; Robert Dilts http://www.nlpu.com/Patterns/patt12.htm

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