Nous contacter

78 avenue du Général Michel Bizot
75012 PARIS

Nous appeler

Niveau de conscience du leadership et de développement d’une organisation, Jean Luc Monsempès

Consciemment ou non, les dirigeants mettent en place des structures organisationnelles, des modes de fonctionnement et de management, des cultures qui leur correspondent, qui sont cohérentes avec leur façon de voir le monde. Ce qui signifie que le niveau de développement d’une organisation ne peut se développer au-delà du point atteint par son dirigeant pour regarder le monde. S’il est par exemple dans l’air du temps pour les entreprises d’afficher des valeurs et sa raison d’être, c’est le niveau de conscience de son dirigeant qui déterminera l’usage de ces valeurs. Bien souvent elles ont une fonction purement décoratives, car elles seront vite oubliées quand il faudra choisir entre le profit et les valeurs. Ce n’est qu’à un autre stade de conscience que les valeurs seront incarnées et serviront d’outil de pilotage de l’entreprise. Prétendre adhérer à des valeurs et les vivre au quotidien est une chose différente. Selon Frédéric Laloux, « L’influence des dirigeants peut s’exercer dans les deux sens : ils peuvent tirer en arrière des modes de fonctionnements avancés, en les vidant de leur efficacité… mais les dirigeants qui ont intégré un stade avancé peuvent aussi tirer leur organisations en avant. S’ils adoptent des structures, des processus et une culture d’un stade avancé ils peuvent ainsi aider les salariés à adopter des comportements qu’ils n’ont pas encore intégré à titre individuel. »

Comme on ne peut pas juger d’un comportement en dehors du contexte dans lequel il a pris naissance, on ne peut pas porter de jugement sur le niveau de conscience d’un dirigeant, sans prendre en compte les caractéristiques de l’environnement dans lequel intervient l’entreprise. Et parmi ces caractéristiques, se trouvent les attentes des clients qui sont eux mêmes dépendants d’un niveau de conscience. Une entreprise dont le niveau de conscience, ou celui de son dirigeant n’est pas en phase avec celui de son marché, est vouée à disparaître. Le vrai génie des organisations est de pouvoir comprendre le modèle du monde de ceux qui achètent ses produits ou ses services. Cette prise de conscience peut être le point de départ d’une nouvelle aventure entrepreneuriale, dans laquelle il s’agit de faire évoluer les modes de pensée et de fonctionnement des individus. Ce sont les individus qu’il convient de faire grandir, avant les profits. La mission principale d’un dirigeant est de capter les signaux faibles des changements des modes de vie et des modes de pensée bien souvent inconscients qui les accompagnent. Puis de faire preuve de suffisamment d’agilité pour mettre en place une organisation capable de penser le monde comme ceux à qui ils s’adressent. Plus la vision du monde du dirigeant est en mesure de comprendre la complexité du monde, plus il sera en mesure de résoudre efficacement les problèmes auxquels il sera confronté.

Les niveaux d’existence selon C. Grave

Clare Graves (1914-1986), un professeur associé de l’Université de New York a passé près de 35 années de recherches universitaires à tenter de répondre à la question suivante «  Qu’est ce qu’une personnalité mature ? » Devant la masse des réponses obtenues auprès de ses étudiants, il a établi des regroupements pour aboutir à un ensemble de définitions. Il a aussi réalisé que les individus évoluent au cours de la vie selon une spirale chronologique de différents « niveaux d’existence », qu’il a nommée ECLET (théorie émergente et cyclique des niveaux d’existence) Après sa retraite, ses travaux ont été repris par Don Beck, un professeur d’université du Texas et son collègue Christopher Cowen. Ils renomment le modèle « Spirale Dynamique » et donnent à chaque niveau le nom de Vmême. Don Beck a collaboré avec le philosophe Ken Wilber et ce dernier a décrit des niveaux d’évolution de la conscience humaine, une conscience individuelle qui s’agrandit, se déploie, évolue d’échelon en échelon. Selon la théorie des holons ou holarchie (empruntée à Arthur Koestler). Le passage d’un échelon à un autre résulte d’une crise, d’une difficulté à s’adapter à un nouvel environnement. Il faut progressivement se différencier d’un niveau pour le transcender et l’inclure.

Clare Grave a ainsi mis à jour huit niveaux d’existence, organisés en spirale ascendante, chaque niveau étant associé à une valeur profonde à  laquelle il a attribué une couleur pour des raisons mnémotechniques.

SD Spirale valeurs

Comme l’on montré les travaux de nombreux chercheurs, l’humanité évolue par étapes, en fonction de stades de conscience différents. Les humains n’évoluent pas comme les arbres dont la croissance est continue, mais évoluent par transformations soudaines, comme la chenille qui devient papillon, ou le têtard qui devient grenouille.

Les principes de la Spirale Dynamique

Ce modèle repose sur un certain nombre de principes et nous en proposons ici une description simplifiée

La cartographie des valeurs

Un niveau d’existence est associé à des valeurs. Les valeurs affichées par les individus ont comme pour un iceberg, différents niveaux de profondeur. Il y a les valeurs de surface dont les individus parlent volontiers. Puis les valeurs cachées qui ne sont pas explicites et qui peuvent rentrer en conflit avec les valeurs de surface. Par exemple des entreprises peuvent avoir des pratiques guidées par des valeurs bien différentes de celles qui sont placardées sur les murs, ce qui mène à bien des difficultés. Il y a enfin les valeurs profondes, souvent inconscientes, et qui conditionnent les autres niveaux de valeur. Le modèle de la Spirale Dynamique décrit les valeurs profondes de huit niveaux d’existence. Les changements de valeurs de surface ne signifient pas forcément un changement de valeurs profondes. Il est important de noter que ces niveaux de valeur n’ont rien à voir avec le niveau d’intelligence (Quotient Intellectuel). Le système de valeur parle autant de psychologie que de sociologie. Et enfin les valeurs passent sans cesse d’un système centré sur l’individu à un système plus collectif.

Les systèmes de valeur résultent des interactions entre les conditions de vie et les capacités cérébrales des individus.

Ce sont donc les conditions de vie qui déterminent le bon niveau d’existence et sa valeur profonde. L’individu a besoin de certaines capacités cérébrales (mentales, physiques et émotionnelles) pour activer le niveau d’existence adapté (avec un système de valeur) aux conditions de vie et des capacités cérébrales. Une personne mature est celle dont le système de valeur est adapté à ses conditions de vie. Il n’y a donc pas de raisons valables de changer de niveau d’existence en l’absence de changement des conditions de vie. Pour Grave, certaines personnes n’ont pas la capacité cérébrale suffisante pour activer certains niveaux d’existence. Et un niveau de conscience trop avancé par rapport aux conditions de vie peut également poser problème.

La notion d’holarchie

Un holon est un tout autonome qui lui même est un élément d’un tout plus grand. Une cellule est un tout autonome et en même temps un élément d’un tout plus grand (un tissu, puis un organe…etc.). Dans une holarchie, un concept d’Arthur Koestler, un élément d’un tout est en mesure de réactiver l’ensemble. Cette notion d’holarchie s’applique aux niveaux d’existence. La spirale dynamique est une holarchie car les niveaux ne se remplacent pas mais s’ajoutent, chaque niveau d’existence modifiant ses propres conditions de vie. Quand les conditions de vie changent, un niveau diminue et un autre émerge puis domine, avant d’être à son tour frappé d’obsolescence. Les niveaux anciens ne disparaissent pas et peuvent redevenir indispensables pour survivre (par exemple dans le cas d’une personne qui se retrouverait à la rue). Donc chaque niveau d’existence englobe sans le remplacer le niveau précédent, et lui apporte des fonctions supplémentaires.
A un moment donné, on peut donc rencontrer chez une personne ou une organisation, différents niveaux d’existence en même temps. La spirale dynamique est une holarchie émergente et ouverte car de nouveaux niveaux d’existence peuvent apparaître.  

Les aspects positifs et négatifs de chaque niveau d’existence

Tout système de référence (niveau d’existence) contient des aspects positifs et négatifs
Par exemple la valeur Matérialisme apporte d’un côté un formidable confort de vie (logement, transport, santé, et d’un autre côté une destruction de l’environnement et le développement des inégalités sociales. Chaque niveau sait gérer ses propres conditions de vie et pas ceux des autres niveaux. Aucun niveau n’est dans l’absolu meilleur qu’un autre. Et il n’y a aucune corrélation entre un niveau et l’origine ethnique, l’âge, le sexe, l’intelligence, le développement psychologique ou intellectuel. Ce qui change d’un niveau à l’autre, est uniquement la capacité à gérer un environnement de plus en plus complexe. Le changement de niveau n’est souhaitable que si les précédents ne sont plus adaptés aux conditions de vie. Et enfin on ne peut pas avoir une notion objective de ce qu’est un niveau tant qu’on y est dedans.

La psychogénèse récapitule la sociogenèse

Les individus (psychogénèse) comme les sociétés (sociogenèse) passent par tous les niveaux. Et chaque enfant revit à travers son développement, l’histoire de l’humanité, pour atteindre le niveau de conscience de sa culture ou de sa sous culture. L’évolution de l’enfant résulte en partie des changements de niveaux en fonction de son âge, et en partie de ses propres expériences personnelles.

Le tableau ci-dessous rassemble les différents niveaux d’existence selon C. Graves

SD Tableau spirale

 

Les travaux de Fréderic Laloux

Frédéric Laloux est un ancien partenaire associé de McKinsey et l’auteur d’un ouvrage à succès, Réinventing Organizations, dans le domaine du management. Ses travaux reprennent les niveaux de conscience de C. Grave, Wade et Ken Wilber pour montrer qu’à chaque fois que l’humanité est entrée dans une nouvelle ère de développement, elle a inventé une façon inédite de penser le management. Chaque stade est examiné selon ses différentes facettes (vision du monde, besoins, développement cognitif et moral) et à chaque niveau ou paradigme est attribué un code couleur (celui de Ken Wilber). Le formidable apport de F. Laloux est d’avoir donné une application organisationnelle des stades de conscience, (ou nouveau paradigme), et de rendre visible le nouveau modèle d’organisation qui est en train d’émerger, porteur de sens, d’enthousiasme et d’authenticité.

F. Laloux, montre que « L’évolution de la conscience humaine s’est faite par bonds successifs et à chaque étape, la société a fait un bond en avant dans ses capacités cognitives, morales, psychologiques. Chaque bond en avant a généré de nouvelles formes de technologie, d’économies, de gouvernements et de religions, mais aussi de nouvelles formes d’organisations. Chaque basculement de conscience a ouvert la porte à une étape nouvelle de l’histoire humaine »

La phrase d’Einstein « on ne peut résoudre un problème depuis le niveau de conscience qui la créé », nous invite à admettre qu’un nouveau niveau de conscience et une nouvelle vision du monde sont des préalables à une nouvelle conception des organisations. Le modèle organisationnel que nous connaissons aujourd’hui résulte de notre vision actuelle du monde, de notre stade de développement actuel. Les modèles d’organisation qui ne correspondent pas à notre niveau de conscience, ne peuvent être perçus.

Frédéric Laloux montre dans son livre que chaque nouveau stade de conscience permet la mise en place d’un nouveau modèle d’organisation et la possibilité de gérer des problèmes de plus en plus complexes, d’obtenir des avancées majeures et des résultats qui auraient été inimaginables aux stades précédents. Il cite les travaux de chercheurs tels que Clare Graves, Wiliam Tobert, Suzanne Cook-Greuter et Keit Eigel, pour lesquels plus les dirigeants ont gravi d’échelons sur l’échelle du développement, plus ils sont efficaces.

« Voir c’est croire. Croire c’est voir. Vous voyez les choses non telles qu’elles sont mais tel que vous êtes » Eric Butterworth

Les descriptions ci-dessous s’appuient sur les huits niveaux de conscience du modèle de la Spirale Dynamique de C. Graves (avec son code couleur) et sur les applications organisationnelles et managériales de F. Laloux. Ces huits niveaux sont regroupés en 2 cycles et 4 catégories.

Subsister seul et en groupe

Dans les deux premiers niveaux d’existence (Beige et Violet), l’individu doit en premier assurer sa survie. En Beige, il cherche à survivre par la satisfaction de ses besoins physiologiques et l’évitement des prédateurs plus forts que lui. Puis en violet il découvre que l’appartenance à un groupe et le respect des traditions peuvent lui apporter plus de sécurité.

Stade de Survie–Paradigme Beige

SD1 Beige couleurSD1 Beige1

Nous sommes ici au début de l’histoire de l’humanité qui s’étend de 100000 à 50 000 ans avant notre ère. L’objectif de l’existence est de rester en vie en recherchant à manger par la cueillette ou la chasse ou en se protégeant des prédateurs humains ou animaux.

Vision du monde : la survie individuelle
Conditions de vie : le monde est un milieu naturel hostile dans lequel il convient de survivre. L’alimentation est surtout assurée par la cueillette. La peur principale est de ne pas trouver de nourriture. La violence pour la subsistance est omniprésente.
Thème : Exprimer le soi automatiquement en fonction des impératifs physiologiques et des possibilités de l’environnement

Développement psychologique :
Le soi s’exprime par la pensée automatique et la réactivité aux possibilités de l’environnement, en fonction des impératifs physiologiques de base (boire, manger, dormir, se couvrir, se reproduire…). Les individus ne se perçoivent pas comme indépendants des autres et de l’environnement et vivent dans le présent permanent car il n’y a pas de conception du temps.

Les valeurs et la vie sociale
Il n’y a pas encore de système de valeurs individuelles ou collectives conscientes. La vie sociale  s’organise en petits groupes familiaux dont la taille ne dépasse pas une douzaine de membres. Au-delà la cohésion du groupe n’est plus possible du fait de l’absence de règles pour gérer des relations interpersonnelles. Il n’y a pas de conscience du groupe, ni de hiérarchie au sein du groupe. En cas de danger, un regroupement en horde ou en bande s’organise.

Les caractéristiques
Les individus suivent leurs instincts pour assurer leur survie physique. Ils impactent peu leur environnement et apprennent par la répétition et l’accoutumance.
Communiquer consiste à assurer la survie des individus.

Survivance de ce stade
Le stade caractérise celui du nouveau-né dont les seules préoccupations sont de satisfaire les besoins physiologiques.
On trouve encore quelques représentants de cette période lointaine dans des endroits reculés du monde, ou chez des personnes dont le niveau de conscience est altéré (démences séniles, coma…etc.) ; ou de personnes vivant dans des conditions de vie très précaires (SDF, réfugiés, situations de torture)

Organisation du travail
Il n’y a pas de division du travail en dehors des rôles sexuels. Les femmes qui portent et élèvent les enfants.

Stade magique- Paradigme Violet

SD2 Violet couleurSD2 Violet

Il y a environ 70 000 ans, l’humanité a commencé à entrer dans un stade de conscience que certains auteurs ont appelé magique. La survie du groupe dépend de la vie en groupe et du respect de rites et du bon vouloir des esprits.

Vision du monde : assurer sa sécurité

Conditions de vie : l’individu découvre un monde mystérieux et effrayant qu’il ne comprend pas. Pour assurer sa sécurité, il convient de se regrouper, et de se mettre au service des attentes des anciens, car eux savent comment fonctionne le monde. La peur principale est celle de l’exclusion de la tribu et non celle de la mort.

Thème : sacrifier le soi aux désirs des anciens et aux coutumes des ancêtres.

Développement psychologique
L’individu n’a pas le sentiment d’exister en tant que personne mais en tant que membre d’un groupe. Le sentiment d’appartenance apparaît. L’avancée majeure est la découverte de la relation de cause à effet, par exemple entre l’acte sexuel et la reproduction, entre l’usage d’une arme et la mort, entre l’ingestion d’un aliment et la maladie. Avec une amplification de cette causalité, l’individu met des esprits magiques en tout : le temps, la chasse, la santé, la reproduction… tout dépend du bon vouloir des esprits qu’il convient d’implorer. La pensée est animiste. On vit dans le présent et dans l’histoire des ancêtres, mais sans capacité à se projeter dans le futur.

Valeurs et vie sociale

Les valeurs sont collectives : celles de la sécurité par le sentiment d’appartenance et l’obéissance aux anciens, esprits de la nature, traditions ancestrales et objets sacrés.
La vie sociale s’organise en famille élargie et en tribu de plusieurs centaines de membres. Le pouvoir individuel n’existe pas, en dehors de celui des anciens, sorciers et chamanes qui ont droit à des privilèges. La structure est égalitaire, et le lien est créé par l’obéissance aux ancien, les rituels, et la réciprocité (La dynamique d’échange n’est pas entre individus séparés mais au sein du groupe). Ceux qui vivent en dehors du groupe ne sont pas des humains mais plutôt des animaux.

Les caractéristiques
Les points positifs : la priorité donnée au groupe, à la famille, à la lignée. Le partage comme règle de vie car la richesse des membres de la tribu est un bien commun dans lequel chacun peut se servir. (Si ma chasse a été mauvaise, je peux me servir chez mon voisin). Rendre serait considéré comme la rupture du lien.
Les points négatifs : les croyances superstitieuses exagérées, la peur de l’exclusion d’un groupe et la négation de l’individualité.
Pour communiquer avec ce groupe, il convient de parler uniquement avec les anciens ou les chamanes, mais jamais directement avec les membres de la communauté.
Les jeunes apprennent des aînés par conditionnement.

Survivance de ce stade
Ce stade est présent dans la pensée magique de l’enfant de 3 mois et 2 ans, quand il a accès à la différentiation sensori-motrice (mordre ses doigts n’est pas la même chose que mordre sa peluche), et émotionnelle (la présence de la mère apporte un sentiment magique de sécurité).
On retrouve ce stade dans de nombreux aspects de notre vie : les superstitions excessives (horoscope, voyance, chiffres magiques ou proscrits (le 13 !), les fantômes, le loto, le trèfle à quatre feuilles, les gris-gris, le fer à cheval, les animaux fétiches) ; le culte des ancêtres et des anciens (autorité de l’âge) très présent en Asie et en Afrique ; des rites de sorcellerie ou de candomblé ; l’attachement à des traditions ancestrales, sectaires ou païennes (fêtes familiales ou traditionnelles, potions magiques pour guérir, la manière de couper le pain, la petite souris pour la perte de dents, rites de passage…etc.)

Organisation du travail

Il n’y a pas encore d’organisation structurée du travail ou de division du travail. Il y a d’un côté les membres de la tribu et d’un autre côté les anciens qui jouissent d’une certaine autorité.

Acquérir une identité matérielle et sociale

Les deux niveaux d’existence qui suivent permettent la construction d’une existence propre. En Rouge, l’individu s’affirme en se connectant à l’énergie de sa force et de sa puissance personnelle. En Bleu l’individu va se définir d’une part par sa place et son rôle dans une société très hiérarchisée, et d’autre part par la recherche d’un sens à son existence. Pour la PNL, c’est l’expérience de la première position de perception, avec une délimitation des frontières personnelles (Rouge) et aussi l’expérimentation de la deuxième position (Bleu)

Le stade Pouvoir- Paradigme Rouge

 SD3 Rouge Couleur SD3 Rouge

L’être humain réalise qu’il existe en tant qu’individu distinct, qu’il a également des besoins différents des autres et que pour les satisfaire, il pourrait faire mieux que les ancêtres ou les chamanes. Il découvre sa puissance personnelle et les moyens de satisfaire ses désirs de manière impulsive, si besoin aux dépend des autres. C’est la loi du plus fort. Il y a environ 10 000 ans, en même temps que les débuts de l’agriculture, apparaissent les premières chefferies, ainsi que les premières formes d’organisations du travail.

Vision du monde : la recherche du pouvoir

Conditions de vie : le monde est dangereux et les autres sont des prédateurs. La satisfaction des besoins va dépendre de la force, du pouvoir, de la puissance et de la domination. Le concept de morale n’existe pas encore. Si l’autre est plus fort, il convient de se soumettre en espérant une protection.
Thème : exprimer le soi sans culpabilité pour satisfaire immédiatement ses besoins.

Développement  cognitif et psychologique 
La pensée s’organise de façon polaire, avec une vision du monde en noir et blanc, fort/faible, bon/mauvais, je veux/je ne veux pas.
Avec cette construction des frontières psychologiques, apparait la conscience d’un soi distinct des autres et du monde, et la différentiation de l’égo, apparaît. La pensée est égocentrique. Avec la prise de conscience de la séparation, l’individu expérimente la réalité de la souffrance et de la mort. La compréhension des relations de causalité (récompenses ou punitions immédiates) est simple et rapide. Le raisonnement s’arrête dès l’obtention de ce qui est recherché.

L’individu étant focalisé sur le présent, « voilà ce que je veux et tout de suite », il ne sait pas planifier ou établir des stratégies, sauf pour satisfaire rapidement ses besoins par la force ou la violence, la manipuler ou la soumission. Il est incapable d’imaginer les conséquences de ses actes chez les autres.

La peur est celle d’être victime des autres. Il y a peu d’empathie pour les sentiments d’autrui. Si la culpabilité n’existe pas du fait de l’absence de règles morales, la honte est très présente. Si son image de puissance n’est pas respectée ou s’il est surpris en position de faiblesse, il peut ressentir une intense émotion de honte.

Les valeurs individuelles et la vie sociale

Les valeurs profondes sont celles du pouvoir, de la domination et de l’exploitation des autres.
L’important est de satisfaire ses pulsions, peu importe les autres, de dominer pour ne pas être dominé, de ne pas subir les conséquences de ses actes. L’individu « rouge » est sensible à ce que les autres pensent de lui. Car il veut qu’on le respecte, et qu’on respecte ce qui le définit : sa famille, son pouvoir, sa richesse, sa religion, sa parole…etc. La mort est préférable à la honte ou le déshonneur. Le stade « rouge » voit l’apparition des premières organisations de conquête et les premiers empires avec des milliers ou dizaines de milliers d’individus.

Les caractéristiques

La personne mature est celle qui est capable de montrer sa force et son pouvoir.
Les points positifs : le haut niveau d’énergie, l’action rapide, le courage et la ruse, l’absence de limites personnelles et de territoire, le gout du risque et l’esprit de conquête. Le stade Rouge est approprié aux situations qui nécessitent une réaction immédiate, par exemple pour sauver la vie de quelqu’un ou sauver sa vie, ou dans des environnements hostiles (combats, guerres civiles, états en déliquescence, prisons ou quartiers défavorisés), ou
Les points négatifs : un égo surdéveloppé et une priorité donnée à la satisfaction des plaisirs personnels, l’absence d’empathie vis-à-vis de la souffrance des autres et le narcissisme, l’utilisation des autres à son profit,
Celui qui a le pouvoir communique avec directivité et fermeté. On communique avec le pouvoir par un acte d’allégeance.
L’apprentissage des jeunes se réalise par la récompense immédiate, et non pas par la punition qui est un signe de gloire.

Survivance du stade Rouge

Ce stade impulsif rouge est présent chez les enfants de 2 à 4 ans (premier stade de l’opposition) qui apprennent à s’affirmer et à pouvoir quitter plus tard le milieu familial. Le stade Rouge est celui qui vous permet de vous affirmer, par exemple en disant un « non » de façon impulsive.

Le stade Rouge représente l’impulsivité et l’égocentricité, représente 20% de la population en ayant 5% du pouvoir. Ce stade Rouge se retrouve surtout dans des zones défavorisées, les situations de guerres, de nombreuses sociétés tribales, dans les gangs de rues (gang des barbares !) et les organisations mafieuses. Bien des aspects de notre vie moderne sont des survivances du stade Rouge, en particulier quand il s’agit d’exprimer sa force (le vaudou, les sacrifices humains ou d’animaux, la peine de mort, la violence conjugale et le viol, les actes terroristes, le vandalisme, le combat pour les soldes ou une place de parking…etc), imposer son autorité (au travail, éducation, couple,…etc.), exprimer son impulsivité (achats, démission), prendre des risques (en voiture, dans les sports violents ou extrêmes), éviter la honte (de ne pas avoir un titre, une compétence, un diplôme, …etc.).

Organisation “en meute” du travail 

Avec la différentiation de l’égo, apparaît la possibilité de différentier les rôles, une division du travail et l’autorité. Il y a maintenant un chef qui exerce son pouvoir sans relâche et des fantassins qui suivent le chef sous l’emprise de la peur. L’esclavage fait son apparition pour faire travailler les prisonniers des tribus voisines. La métaphore est celle de la meute de loups dans lequel le male alpha montre sa force pour préserver sa position dominante au sein de la meute.

La division du travail : les premières organisations Rouge concernaient la vie militaire, avec la constitution de petites armées de conquêtes.

L’autorité : le chef exerce et maintien son pouvoir en faisant preuve d’autorité et d’une soumission à sa volonté. Pour renforcer sa position, le chef s’entoure de ses proches et des membres de sa famille, censés être plus fidèles, capables de relayer son autorité, et avec lesquels il va partager son butin. L’autorité n’étant pas attachée à un titre ou une position hiérarchique, elle ne peut s’appliquer au-delà de 2 ou 3 échelons distants de celui du chef. Ce qui empêche l’organisation de se désintégrer étant la peur et la soumission, le maintien de l’autorité nécessite des démonstrations publiques de cruauté et de punition (sacrifices des mayas, pendaisons, décapitations publiques relayées de nos jours par les réseaux sociaux).

Stade Ordre-Conformiste- Paradigme Bleu

SD4 Bleu CouleurSD4 Bleu 2

Le risque permanent de violence du stade Rouge fait naître des aspirations à une vie sociale plus calme et ordonnée. Le développement de l’agriculture, environ 6000 ans avant JC, va apporter une plus grande sécurité alimentaire et faire naître une nouvelle organisation de la société et du travail. C’est le passage de l’impulsivité des meutes guerrières du stade Rouge à l’ordre des états et des civilisations du stade bleu. Des règles institutionnelles, religieuses, administratives, ou des idéologies politiques vont organiser et dicter le fonctionnement des communautés humaines.

Vision du monde : la recherche de la vérité

Conditions de vie : le monde est contrôlé par une vérité ultime capable de punir ou de récompenser dans un futur lointain. Il convient donc de trouver sa place, de suivre les règles et d’inciter les autres à en faire de même. Le but de la vie est de lui donner un sens, en se rapprochant de la vérité ultime.

Thème : sacrifier le soi maintenant pour obtenir une récompense plus tard.

Développement  cognitif et psychologique

La pensée devient ethnocentrisme, elle s’organise autour de la recherche d’une vérité ultime (ce qui est bien et mal, vrai et faux,…etc.) extérieure à soi. Ce qui occupe la pensée est de savoir si ce que l’on pense, dit, fait, est conforme aux règles immuables. Car le degré d’obéissance ou la désobéissance aux règles, conditionne la punition dans cette vie ou la récompense dans une prochaine vie.

L’intégration des concepts de causalité, de temps linéaire et de conscience d’autrui permet une projection dans l’avenir. Par exemple, en conservant une partie des graines de la moisson, il est possible d’assurer une nouvelle récolte et l’alimentation de la communauté. Vendre un surplus de récolte permet de s’enrichir. L’obéissance aux règles assure le paradis.

La peur majeure est celle d’être puni. L’impulsivité du rouge est canalisée par l’ordre et la culpabilité. Le stade Bleu voit apparaître les notions de morale, d’autodiscipline et de maîtrise de soi, car c’est maintenant le moyen de garantir son intégration dans la société. Les règles sont intériorisées et leur transgression est source de culpabilité.

Au stade beige, la conscience de la séparation soi/autre n’existe pas, au stade Rouge l’autre est au service de mes intérêts. Avec le stade bleu, apparaît une conscience plus profonde de la séparation soi/autre. L’individu peut s’identifier à un rôle, noter les différences avec les rôles des autres, imaginer comment les autres le voient, et quels peuvent être les sentiments et les perceptions d’autrui.

En internalisant les règles du groupe, la valeur qu’un individu s’accorde va dépendre du regard des autres. Le soi se développe par l’approbation et l’intégration au cercle social.

Les valeurs collectives et la vie sociale

Les valeurs profondes sont celles de l’ordre et du conformisme car seule l’obéissance et la négation du soi permet le salut. Il convient donc de contrôler son impulsivité par l’obéissance aux règles, la punition et la culpabilité en cas de manquement, l’acceptation de sa place dans un ordre immuable, et la demande aux autres d’en faire de même.
La morale du stade Bleu remplace la loi du plus fort du stade rouge. La morale présuppose l’existence de lois immuables sur la bonne manière de faire les choses, et d’une vision très statique du monde (la pérennité des règles) Si vous suivez les règles, vous ne serez pas puni, et éventuellement récompensé dans une vie prochaine.

La vie sociale  des sociétés Bleu est hiérarchisée, stratifiée et se définit par des systèmes de classes, de castes (guerrier, artisan, prêtre, agriculteur…etc.), de grade (dans l’armée, l’administration ou la religion), ou de genres. Un lieu de naissance de l’enfant va déterminer son chemin et son mode de vie. L’autorité est attachée à un rôle (robe du prête ou l’uniforme du militaire), une fonction, un statut, et non plus au pouvoir comme dans le stade Rouge. Cette organisation pyramidale et hiérarchisée, en même temps que l’apparition de l’écriture et l’architecture, a permis le développement des institutions, des administrations, des religions, des idéologies et des partis politiques, des états et des civilisations.

Les caractéristiques

La personne mature est disciplinée, conforme au dogme ambiant et contribue à la stabilité de son système et des règles qui l’organisent.
Les points positifs : le stade Bleu a apporté le sens de la morale, de la justice et de la discipline, la loyauté, le souci des autres et l’esprit charitable, la responsabilité individuelle et collective. Après la violence du stade Rouge, le Bleu a apporté de l’ordre et de la sécurité.
Les points négatifs : le stade Bleu est aussi associé au dogmatisme et l’intolérance, l’autoritarisme et la discipline excessive, le jugement et la punition, la rigidité des normes sociales et sexuelles. La sécurité se paye par l’obéissance et le refuge dans des rôles et des identités strictement définies par la société. Par la rigidité de leurs normes, les sociétés traditionnelles ont engendré d’importantes inégalités sociales. Dans une société du stade conformiste Bleu, il devient fort inconfortable et parfois dangereux d’être une femme, un homosexuel ou un libre penseur.
Pour communiquer efficacement, il convient de suivre la voie hiérarchique.
L’apprentissage des jeunes se réalise en référence à la vérité et aux règles.

Exemples et survivance du stade Bleu

La première grande civilisation du stade Bleu est celle de l’Egypte ancienne, tournée vers la vie après la mort. Puis la naissance du Judaïsme vers 550 avant JC, des autres monothéismes (Christianisme, Islam, Sikhisme) aux alentours du VIème siècle avant JC, et des grands courants philosophiques qui imprègnent encore bien des aspects de la vie moderne. Le stade Bleu s’est retrouvé dans les guerres de religions (les croisés, l’inquisition). Plus récemment, le national-socialisme d’Hitler a promis un Reich de mille ans, et le communisme soviétique a promis aux prolétaires une société sans classe et une vie plus égalitaire.

Avec 30 % de la population mondiale actuelle, et 30 % du pouvoir, le stade Bleu représente le niveau d’existence le plus répandu dans le monde (à égalité avec le stade Orange). Les organisations actuelles du stade violet sont les églises, les administrations, les écoles publiques et l’armée.

Le stade Bleu se retrouve également dans certaines organisations professionnelles, politiques (retour aux valeurs traditionnelles du passé), syndicales, aristocratiques (lié au droit du sang), les castes en Inde, les grandes écoles (ENA, Mines…etc), les psychologies faisant références aux textes ou à un dogme (la psychanalyse), le scénario de stress de l’analyse transactionnelle (travailler dur avant de vivre), les règles et normes sociales (le service militaire, le code de la route, s’habiller pour aller à la messe ou au spectacle), les activités sportives et l’hygiène de vie (pour un bénéfice ultérieur)

Les organisations “Militaires” du stade bleu

L’objectif des organisations Bleu est d’assurer leur stabilité et leur développement, par la construction de système pyramidaux et hiérarchisés, la définition de rôles officiels, la mise en place d’une autorité et d’un contrôle descendant, et de processus de travail à respecter. La métaphore est celle d’une armée en ordre de marche.

Avec l’invention des prévisions, des règlements, de l’autorité basée sur un statut ou un rôle, les organisations Bleu peuvent entreprendre des projets à long terme qui nécessiterons des siècles, comme bâtir des pyramides ou des cathédrales, créer des réseaux de comptoirs coloniaux lointains pour commercer plus facilement. Historiquement les organisations de ce stade visaient le monopole et l’hégémonie. Pour Fréderic Laloux, ce paradigme apporte deux révolutions aux organisations : la mise en place des processus, permettant des développements à long terme, et les rôles officiels permettant la stabilité des hiérarchies instituées.

La mise en place des processus : La pensée par processus permet de projeter l’expérience passée dans le présent et le futur, et de définir des règles à suivre. On peut ainsi reproduire demain ce qui a été fait hier. Et ce qui a fonctionné hier fonctionnera demain. Le savoir n’appartient plus à une personne mais à l’organisation et elle peut être transmise de générations en générations, grâce aux processus. Les individus et les rôles deviennent remplaçables si on applique le processus de succession, ce qui permet aux organisations de survivre au cours des siècles. Quand l’environnement change, les organisations Bleu ont du mal à accepter l’inefficacité du processus habituel (j’ai toujours fait ainsi !), et les nouvelles manières de faire de la concurrence.

La mise en place des rôles officiels : le pouvoir est stabilisé par la mise en place de structures pyramidales, d’organigrammes, de catégorisations et de titres officiels pour transmettre les consignes de haut en bas. Sous le pape, il y a les cardinaux, les archevêques, les évêques et les prêtres. Les directives du PDG sont transmises aux chefs de services puis au contremaitre pour arriver à l’OS. Cette hiérarchie rend possible le développement sans limites de l’organisation. Au sommet de cette hiérarchie, on pense, on décide, on planifie, on fixe des règles, et en bas de la hiérarchie on exécute des tâches répétitives qui n’exigent ni créativité, ni réflexion critique. L’emploi à vie constitue la norme implicite ou explicite, en échange de l’obéissance. Un contrôle est mis en place et la non-exécution des ordres est sanctionnée. Le management participatif comme le développement des talents individuels n’a pas de sens dans ce système. Les individus sont des ressources interchangeables, et l’on ne détecte ni ne développe le talent individuel.

Une vision Bleu ou taylorienne du travail nécessite de cloisonner les fonctions et métiers par la création de services, départements, et de corporations professionnelles. Ces frontières permettent de savoir si vous êtes dans ou en dehors du groupe (nous versus eux) : les ouvriers versus les patrons ; le siège versus le terrain ; les cadres et non cadres ; les actifs et les retraités. Les organisations fonctionnent en silos séparés (marketing versus finance ; production versus vente) et chaque groupe regarde l’autre avec méfiance. En cas de tensions internes, le groupe opposé devient le bouc émissaire.

La vie sociale s’organise à l’intérieur de l’organisation et de la profession. Il n’y a pas encore longtemps, les organisations du stade Bleu cherchaient à vivre en autarcie tant sur l’approvisionnement des matières (les premières usines automobiles possédaient leurs aciéries et leur plantation d’hévéas) que sur la vie des employés qu’il convient d’approvisionner, d’éduquer, de soigner et distraire. Car les ouvriers appartiennent à l’organisation. Le licenciement fait perdre une identité professionnelle et un statut social.

Assurer la satisfaction matérielle et émotionnelle

Avec la force du stade Rouge (et au prix de la violence et de la honte) et le rôle du stade Bleu (au prix de la culpabilité et la menace de punitions) les humains ont pu se construire une identité personnelle. Au stade Orange, l’individu va se convaincre que c’est dans les biens matériels qu’il va trouver le bonheur. Au stade Vert, l’individu réalise la futilité du matérialisme et va chercher à développer des relations harmonieuses avec ses pairs.

Stade de la réussite individuelle-Orange

SD5 Orange couleurSD5 Orange1

En échange de l’obéissance, le stade Bleu promet un paradis pour le futur. Mais quand les récompenses se font trop attendre, les individus vont se dirent qu’il vaut mieux compter sur soi pour obtenir ce qu’on recherche, sans toutefois déclencher l’agressivité de l’environnement. A partir de la renaissance et chez quelques savants et artistes, le mode de pensée Orange a commencé à bousculer les certitudes de la chrétienté et du monde conformiste Bleu. Avec les lumières et la révolution industrielle, la pensée Orange s’est répandue dans les milieux instruits. Depuis la deuxième guerre mondiale, c’est la vision du monde qui prédomine au sein des élites des affaires et de la politique. 30 % de la population mondiale vit avec ce niveau d’existence Orange.

Vision du monde : la recherche de ce qui marche

Conditions de vie : le monde est perçu comme plein de ressources et d’occasion de se créer une vie agréable et prospère, grâce aux biens matériels issus de la science, la technique, le progrès et la compétition. Le monde est régit par des lois naturelles, et leur compréhension permet d’en tirer profit. Le but de la vie est d’exprimer le soi de façon calculée (ou stratégique), pour avancer, avoir du succès et de l’influence, mais de façon socialement acceptable, c’est-à-dire sans déclencher l’agressivité de l’environnement (ni l’égocentrisme du rouge, ni la rigidité du Bleu).
Thème : Exprimer le soi de manière calculée de façon à ne pas déclencher l’agressivité des autres.

Développement cognitif et psychologique 

L’individu imagine des mondes qui ne sont pas déterminés par les règles ou les vérités révélées du stade Bleu, et pour la première fois les expressions « et si » ou « comme si » font sens. Des hommes de sciences deviennent capables d’expliquer les mécanismes complexes du monde et de remettre en cause les vérités immuables des autorités religieuses ou politiques ou les déterminismes hérités. Les individus peuvent se libérer des pensées et comportements que leur dictaient autrefois (Stade Bleu) leur sexe et leur position sociale. La pensée devient profondément rationnelle et matérialiste. Les émotions sont bannies car incontrôlables. Toute forme de spiritualité et de transcendance est suspecte, du fait de la difficulté à croire en ce qui ne peut être ni prouvé, ni observé.
L’efficacité remplace la morale comme étalon de prise de décision.
La peur principale est celle de ne pas avoir de statut et de succès obtenu par son propre travail.

Libéré de toute question spirituelle, l’égo atteint le sommet de sa puissance. Avec la croyance que le bonheur est conditionné par l’atteinte du prochain objectif (salaire, promotion, partenaire de vie, déménagement, voiture), le toujours plus devient la règle. Au stade Orange, la vraie vie se déroule dans le futur. Nous ne savons plus revenir au présent pour en apprécier les cadeaux et savourer la liberté que la bascule dans l’Orange nous a apporté.

Les valeurs et la vie sociale

Les valeurs  profondes sont individuelles et sont celles du matérialisme et du scientisme. Les individus veulent être indépendants et autonomes pour prendre des risques, créer des richesses, vivre confortablement, comprendre le monde de façon rationnelle, trouver de nouvelles manière de progresser, et réussir socialement. Au stade Orange, chacun devrait être libre de poursuivre ses propres buts dans l’existence, et les meilleurs seront récompensés.
Chacun est prêt à adopter toutes conventions sociales ou religieuses dans la mesure où elles peuvent faciliter la réussite sociale et matérielle : habiter les beaux quartiers, adhérer à des clubs ou réseaux fermés (Rotary, Francs Massons…etc.), ou une église, fréquenter les mêmes lieux de loisirs, mettre les enfants dans des écoles couteuses.

Les caractéristiques

La personne mature est celle qui a réussi la compétition de la vie par son propre travail et mérite.
Points positifs : la compétition pour la réussite est source d’énergie, de productivité, de motivation, d’optimisme, de liberté, d’autonomie, d’innovation et de création d’entreprises. La recherche scientifique du stade Orange nous a amené en deux siècles à des niveaux de prospérité sans précédent et nous a fait gagner des années d’espérance de vie. Par le confort matériel qu’il a apporté, le stade Orange a généré du temps libre et l’explosion des activités culturelles. Ce miracle peut maintenant se reproduire à un rythme rapide dans les pays en développement. Après l’égocentrisme du stade Rouge et l’ethnocentrisme du stade Bleu, le stade Orange a fait naitre l’idée d’une perspective universaliste.

Points négatifs : le côté ombre du stade Orange est le matérialisme effréné, l’opportunisme, l’égoïsme, l’avidité et la cupidité, et absence de vision. Les problèmes du futur sont censés être résolus par les progrès techniques. L’ombre du paradigme Orange est présent dans tous les domaines de vie. Les entreprises recherchent des positions dominantes (OPA hostiles, fusions, corruption du pouvoir et des administrations), abusent de leur pouvoir et de leurs richesses (Rémunérations des dirigeants, mode de management centré sur la tâche) aux dépens de leurs salariés, clients, fournisseurs…qui deviennent des variables d’ajustement des comptes d’exploitations et de la rémunération des actionnaires. Les programmes politiques prennent des aspects comptables dépourvus de toute vision. Le travail devient la principale cause de maladies (suicides, burnout, boreout…), le chômage et le surendettement créent des exclus de la société. La surconsommation et l’exploitation dévastatrice des ressources et des écosystèmes de la planète détruisent l’environnement.

Mode de communication passe par la constitution de réseaux et avec les centres de pouvoir.
L’apprentissage des jeunes se réalise par le savoir et l’expérience.

Exemples du stade Orange

Le stade orange correspond à la période de recherche d’indépendance et d’autonomie de l’adolescence. L’Orange représente la prospérité, soit 30% de la population et détient 50% du pouvoir. Quel que soient les domaines de vie le dieu Orange est l’argent et le progrès. Tout peut être récupéré pour créer un marché et de l’argent, même l’aide aux défavorisés.

Le consumérisme du stade Orange s’est étendu aux produits de développement personnel, car la vie moderne impose d’être positif, efficace et heureux (avec la PNL de ses débuts), et a inventé la psychothérapie brève, le coaching (avec retour sur investissement), le speed-dating. Le culte de la performance imprègne le travail (la réalisation du plan de carrière pour gagner plus), le corps (dopage moderne à la coke, le sport intensif, les salles de sport, la chirurgie esthétique, les produits anti vieillissement, les spa, la thalasso …), la santé (les multi vitamines), la sexualité (avec le viagra) et la vie de couple (pour faire un investissement commun). Pour nous donner l’illusion de pouvoir nous rendre plus heureux et plus complets, les entreprises créent sans cesse des besoins nouveaux et des produits à consommer.

Les organisations “mécaniques” du stade Orange

L’organisation Orange a pour but de dépasser ses concurrents, afin de faire plus de croissance et de profits. L’innovation, la responsabilité individuelle et la méritocratie sont les clés de la compétitivité. La métaphore de l’organisation est celle d’une mécanique (unités, rouages, engrenage, niveaux, échelles, entrées, sorties, rythme, rendements, productivité, leviers et curseur, coup d’accélérateur ou de frein, flux d’informations, ajustements, goulets d’étranglement, réingénierie, réduction…etc.). Les êtres humains sont des ressources à positionner dans des organigrammes. Les changements se prévoient, se planifient et s’organisent selon le plan. Si la machine se grippe, une séance de team building mettra de l’huile dans les rouages.

Les groupes multinationaux comme Coca Cola, MacDo, Nike, Amazon, illustrent des organisations du stade Orange. Pour F. Laloux, les organisations du stade Orange ont apporté trois nouveautés radicales : l’innovation, la responsabilité, la méritocratie.

L’innovation : L’individu peut vivre dans un monde d’anticipations qui remet en question le statu quo, et donner forme à des façons de l’améliorer ou de le transformer. Les entreprises Orange ont créé des structures (R&D, Product management…etc) favorisant l’innovation et la création massive de richesse. Au processus des organisations Bleu, les organisations Orange ont ajouté le concept de projets. Aux structures pyramidales du stade Bleu, l’entreprise Orange crée des groupes de projet, des équipes virtuelles, des initiatives transversales, des fonctions expertes et des consultants internes censés accélérer l’innovation.

La responsabilité : pour innover rapidement, il faut mobiliser plus de capacités cérébrales, faire confiance, donner de l’autonomie de penser et de faire. Le management par objectif et la délégation deviennent la solution. Et de nombreux outils vont faciliter le travail de prévision, de budgétisation, de planification, et de vérification des objectifs. Au bâton du stade Bleu, se substitue la carotte du stade Orange. Mais les bonnes intentions sur les conditions de l’innovation (Autonomie, responsabilisation, décentralisation des décisions, confiance…) peuvent facilement être contrariées par l’égo et ses peurs de perdre le contrôle.

La méritocratie : les contributions de chacun à la bonne marche de l’entreprise étant reconnues, tous les salariés ont la possibilité d’en grimper les échelons. Il convient de mettre chacun à la bonne place dans l’organigramme en fonction de ses talents, et trouver des moyens de stimuler et récompenser la performance individuelle. Ce n’est plus l’uniforme qui indique le grade (Stade Bleu). Les nouveaux signes extérieurs de réussite sont la voiture de fonction, taille du bureau, carte de crédit, voyage en première classe, place de stationnement, séminaires, revenu, primes ou des stocks options. Le stade Orange a inventé RH et leurs outils de travail (entretiens d’évaluation, gestion des compétences et des talents, GPEC, planification des ressources et des formations…). Avec l’incitation à progresser et à gérer sa carrière, l’emploi à vie disparait et le changement rapide de fonctions ou métiers devient la norme.  

Pour progresser, il faut être intelligent et travailler dur, et également montrer qu’on a la capacité à porter le masque qu’exige la fonction. Il convient de donner une image de sérieux et de compétences, en montrant qu’on est un individu totalement rationnel, maître de soi par le contrôle des émotions, de ses illusions, de sa spontanéité et de son authenticité.

Après une course effrénée de 20 ou 30 ans à la réussite, parfois quelques « accidents » de vie (burnout, divorces, maladies…) des prises de conscience douloureuses se font : l’obsession matérialiste ne permet pas de se sentir plus complet et plus heureux, le travail acharné n’aboutit pas toujours au sommet de la pyramide, il doit exister une vie plus riche et plus satisfaisante, une vie professionnelle plus humaine et qui ne se résume pas à compter, planifier, organiser, programmer.

Le stade pluraliste- Paradigme Vert

 SD6 Vert couleurSD6 Vert2

A la fin du XVIII et la fin du XIX dans les pays industrialisés, quelques individus ont commencé à se battre pour l’abolition de l’esclavage, la libération des femmes, la séparation de l’église et de l’état, la liberté religieuse et la démocratie. Au 20ème siècle la recherche d’égalité et de pluralisme du stade vert a attiré de plus en plus de personnes, dont les partisans de la contre culture des années 1960 et 1970. Le stade vert veut faire voler en éclat l’édifice des castes, des classes sociales, du patriarcat, des dogmes et des religions instituées des stades Bleu et Orange. Le stade vert a une vive conscience des aspects peu glorieux produits par le stade Orange. Avec ses obsessions matérialistes, les inégalités sociales, la perte du sentiment de communauté, l’absence de vision, l’humain n’est plus au centre des préoccupations. Il recherche la justice, l’égalité, l’harmonie, la communauté, la coopération et le consensus.

Vision du monde : le relativisme

Conditions de vie : le monde est l’habitat commun de l’humanité et ses ressources appartiennent à tous. La vérité n’existe plus et tous les points de vue méritent le même respect. Au stade vert, l’individu accepte le sacrifice de soi (stade Bleu et Orange) pour aller vers un niveau d’existence plus collectif et des relations plus harmonieuses. Et pour corriger la superficialité du stade Orange, il devient très sensible aux ressentis individuels. Au stade vert, l’objectif est d’appartenir à une communauté et d’y vivre de façon égalitaire et en harmonie. La non agressivité est une règle explicite du stade vert.
Thème : sacrifier le soi pour obtenir maintenant une harmonie pour soi et les autres

Développement cognitif et psychologique

La pensée est relativiste et pluraliste. Si toutes les idées se valent, cela implique qu’on ne peut pas imposer un point de vue aux autres. Il convient de recueillir les ressentis de chacun puis de chercher un consensus. Les décisions se prennent sur des facteurs émotionnels et ne pas exprimer ses émotions est inapproprié et serait source de rejet. Avec la croyance que tous les points de vue méritent le respect, l’égo du stade Vert va chercher à nouer des liens étroits et harmonieux avec tout le monde. Les contacts amicaux et chaleureux deviennent le ciment de la communauté. La notion de culpabilité réapparait, mais c’est la culpabilité d’un groupe qui peut se sentir coupable de bénéficier de plus de ressources (par exemples alimentaires) qu’un autre.

Pour cette vision du stade Vert, la qualité des relations est plus importante que les résultats, et les processus de décision doivent recueillir l’avis de tout le monde et chercher à réconcilier les points de vue opposés dans un consensus final.

Valeurs et organisation sociale

Les valeurs  sont sociocentriques et communautaires. L’important est d’être égalitaire dans la distribution des ressources, de promouvoir un sens de la communauté, de décider de façon consensuelle, de se reconnecter avec son corps, ses émotions et une vie spirituelle. La vie sociale est marquée par le réseau. Un ou plusieurs réseaux dans lequel on se rencontre physiquement ou virtuellement et dans lequel on a un sentiment d’appartenance et de partage.

Caractéristiques du stade Vert

La personne mature est noble, généreuse, empathique et attentive à autrui, de façon à ce que tous puissent progresser et s’accomplir.

Points positifs : les qualités centrées sur la relation (empathie et sensibilité, compréhension), le travail en groupe (collaboration), la libération de l’individu de l’exploitation du stade Orange, la distribution égalitaire du pouvoir et des ressources.
Points négatifs : la négation de l’individualité, la lenteur des processus de décision et le manque d’énergie, la relation ambiguë aux règles (le risque de se débarrasser des règles ou le risque de leur aspects arbitraires et injustes). Car au nom de la tolérance, certains peuvent exprimer des idées intolérantes. Le stade Orange trouvera les idées du Vert, le stade Rouge s’imposera comme chef, et le Bleu à refixer des règles. La recherche d’un consensus au sein de larges groupes fait l’objet d’épuisantes et stériles discussions, ce qui déchaîne  les jeux de pouvoir pour relancer le mouvement.

Pour communiquer, il convient de se connecter et de partager avec les membres de la communauté. L’apprentissage se réalise par l’observation et l’échange.

Exemples du stade Vert

Si le stade Orange prédomine de nos jours dans le monde des affaires et la politique, le Vert est très présent dans la pensée universitaire, les ONG, les militants associatifs. Les activités au stade Vert sont celles où tout est interactif et partagé avec une absence de pouvoir central, de hiérarchie ou d’obligations (on y va quand on veut).
Les démarches de repentance institutionnelles (religieuses ou politiques), le refus du vote car cela signifie qu’une majorité exploite une minorité; Pour la santé et le bien-être : les médicaments génériques, les couvertures universelles et mutuelles, les publicités contre le tabagisme passif, les alcooliques anonymes, les thérapies de groupe, la Communication Non Violente, les démarches spirituelles pour s’en remettre à un Dieu qui est en chacun de nous : dans l’éducation : les écoles Montessori, Fresnel.
En économie et dans l’entreprise : le commerce équitable, la vie en kibboutz, Internet qui au départ se faisait avec linux, Wikipdia, les recrutements qui se font par consensus, la banque du temps pour des échanges de service.

Les expériences communautaires, égalitaires et coopératives qui se sont créées à la fin du 19ème et au début du 20ème en réaction aux inégalités criantes de la révolution industrielle ou dans les communautés hippies des années 60, n’ont jamais réussi à se développer en taille ou sur la durée.

Les organisations “Communautaires” du stade Vert

Au sein de la pyramide hiérarchique classique, l’accent est mis sur la culture et l’autonomie des salariés, afin d’obtenir une motivation importante. La métaphore dominante des organisations vertes est celle de la famille, une communauté au sein de laquelle les salariés sont prêts à partager et s’entraider. Chacun possède le pouvoir à part égale et participent aux décisions à l’unanimité. Si l’égalitarisme radical du stade Vert s’est révélé inapplicable, il a cependant permis pour F. Laloux, la création de trois révolutions qui sont venues s’ajouter à celle du stade Orange : l’autonomisation, une culture de valeurs fortes, et le point de vue de toutes les parties prenantes.

L’autonomisation : la hiérarchie fondée sur le mérite du stade Orange est maintenue, et chaque salarié es’y doté d’un pouvoir de décision pour résoudre les problèmes quotidiens, et bien mieux que les experts éloignés des problèmes. Chez Southwest Airlines, le personnel au sol est ainsi chargé d’imaginer des solutions aux problèmes des passagers. Pour l’encadrement, cette démarche de décentralisation peut être perçue comme un partage du pouvoir et du contrôle. Les entreprises qui veulent adopter la décentralisation doivent être très claires sur le type d’encadrement attendu. Le chef est au service et à l’écoute de ses équipes, pour les motiver, les rendre autonomes et développer leur potentiel. Une posture qui nécessite beaucoup d’humilité et l’acceptation d’une remise en cause par un 360 °.

Une culture de valeur forte : les valeurs sont suffisamment fortes, partagées et incarnées pour cimenter les collaborateurs décentralisés. Ces valeurs fondent la confiance. Elles sont très vivantes, quand les dirigeants managent à partir de la culture et des valeurs partagées, et quand les collaborateurs sont reconnus pour leur contribution à la mise en œuvre des valeurs. Des études montrent que les entreprises où les valeurs sont motrices peuvent distancier largement leur concurrents.

Le point de vue des différentes parties prenantes : les organisations Orange cherchent à maximiser les profits dans l’intérêt des actionnaires. Les organisations vertes chercheront à ce que toutes les parties prenantes (salariés, partenaires, environnement) puissent bénéficier des richesses produites. Au sein d’une démarche RSE, les organisations vertes considèrent que leur responsabilité sociale, sociétale et environnementale est au cœur de leur raison d’être.

Reconstruire l’homme et le monde

Si l’être humain prend conscience que les stades précédents lui ont été utiles, il réalise aussi les dégâts qu’ils ont pu produire sur lui et le monde. Il va donc chercher à reconstruire l’homme et le monde. Reconstruire le monde en passant par une reconstruction de l’humain dans son authenticité (stade Jaune) et son autodétermination, puis par un élargissement de sa perception dans une vision holistique du monde vivant qui l’entoure (stade Turquoise)

Clare Graves et d’autres auteurs ont considéré que le passage de Vert à Jaune était une étape importante du parcours de l’humanité et ont désigné comme « conscience de premier niveau tous les stades qui vont jusqu’à Vert et comme « conscience de second niveaux » les stades qui commencent au stade Jaune. « La conscience de premier niveau considère que sa vision du monde est la seule qui soit vraie et que ceux qui n’y adhérent pas se trompent dangereusement. Ceux qui progressent vers le stade Jaune sont pour la première fois en mesure d’accepter qu’il y a une évolution de la conscience, que cette évolution va toujours vers plus de conscience dans son rapport au monde, ce qui justifie que je qualifie ce stade d’évolutif ». Les stades Jaune et Turquoise de l’évolution de l’humanité correspondent à ce que Maslow appelle « l’accomplissement de soi ». D’autres auteurs l’ont désigné comme stades de l’authentique ou de l’intégral.

« Quand nous cessons de penser en priorité à nous-même et à notre survie individuelle, nous connaissons une transformation véritablement héroïque » Joseph Campbell

Stade Communion/Evolutif du paradigme Jaune

 SD7 jaune couleurSD7 Jaune2

L’utopie égalitaire du stade Vert commence à montrer ses limites, dès qu’il convient d’agir rapidement et de prendre des décisions. La taille des groupes, même avec des individus qui partagent les valeurs du Vert, devient un véritable obstacle quand il s’agit d’écouter tous les points de vue. Et l’individu du stade Vert peut ne pas savoir s’affirmer en cas de besoin, ce qui peut aboutir à une paralysie du système. L’impact négatif du stade Vert sur ses conditions de vie fait apparaître des frustrations, des colères, de nouveaux besoins et valeurs et un nouveau niveau d’existence. Au stade Jaune l’individu se pose la question de se changer soi-même pour changer l’état désastreux du monde. Le stade Jaune est apparu dans les années 1960-1970, en même temps que la publication de la Théorie Générale des Systèmes de Ludwig von Bertalanffy.

Vision du monde : la justesse intérieure

Conditions de vie : le monde est un ensemble de systèmes complexes inter-reliés, et dont il faut assurer la viabilité. L’humanité est un système ouvert et sa survie dépend donc de celle de toute vie. Pour bien vivre dans un monde marqué par le changement et l’incertitude, il est vain de vouloir contrôler la vie en lui imposant une direction. Il convient de lâcher prise et d’être attentif à la vie qui demande à vivre à travers nous. L’objectif de la vie s’inscrit dans le cadre de principes personnels, pour mettre en œuvre son indépendance et une affirmation de soi, travailler à devenir ce qu’on est, réaliser ce pour quoi ils sont faits.

Thème : Exprimer le soi, mais jamais aux dépend des autres, pour que toute vie puisse continuer de manière naturelle et fonctionnelle.

Pensée et développement cognitif : systémique et globalité

Le monde est perçu comme un déploiement progressif de notre vraie nature tant personnelle que collective. Et certains modes de pensée vont nous y aider :

La pensée paradoxale : La révolution cognitive du stade Jaune est celle de la pensée paradoxale. Le monde peut être perçu à deux niveaux : celui superficiel de la forme dans lequel existe bien des vérités opposés (Ou bien A , ou bien B, chaud ou froid, solide ou liquide…etc) et le monde dans lequel les opposés peuvent coexister simultanément et se complètent (le yin et le yang, la vie et la mort, le masculin et le féminin, le mental et le corps, la lumière et l’ombre, la liberté et la responsabilité, vie personnelle et vie privée, l’égo et l’âme, l’égoïsme et la générosité. Nous cherchons à réunir ces différents aspects de notre expérience pour être entier dans la relation à autrui. Au stade Jaune, nous sommes capables de dépasser les oppositions binaires et de les intégrer au sein d’une vérité supérieure du non-jugement.

La pensée systémique : dans un système ouvert, il est possible de définir une action réaliste en prévoyant les conséquences possible sur le système auquel elle est reliée. C’est la métaphore de l’aile du papillon de l’Amazone qui déclenche une tornade en Chine. La pensée systémique amène l’individu à préserver les ressources, à faire le mieux possible avec le moins de ressources possibles. Conscient des lois naturelles et de l’incertitude, elle va privilégier la fonctionnalité.

Le savoir et les intelligences multiples : la vie est un apprentissage permanent et l’individu est disponible pour partager son savoir. Il est également conscient des limites de son savoir et accepte ses zones d’ignorance. Sachant qu’il ne sait pas, il sera moins tranché dans ses avis. Il peut être par contre intolérant vis-à-vis de ceux qui ne savent rien et prétendent savoir. Si le stade Orange se méfiait des émotions, et le stade Vert les valorisait, le stade Jaune reconnaît plusieurs formes d’intelligence, l’intelligence cognitive et analytique, l’intelligence émotionnelle et somatique du corps, et l’intelligence du champ des relations qui nous connectent aux autres et au monde.

La générativité : quand le jugement disparaît, les relations acquièrent une qualité nouvelle et nous sommes en mesure d’écouter nos différences sans les juger, et de créer un espace commun de créativité, pour générer quelque chose qui n’aurait pu exister autrement.

Conscience et développement de l’égo

L’ego représente une vision du monde figé, et détermine le rôle que nous pensons devoir adopter pour satisfaire nos besoins dans ce monde. Etre privé d’égo est donc naturellement source de peurs, voire de paniques. « Si je ne suis plus cette personne, je n’existe plus » ; En abandonnant une vision du monde à laquelle nous étions accroché, nous prenons de la distance avec notre ego, nous sommes alors en mesure de voir que les peurs, les ambitions et les désirs conduisent le plus souvent notre vie. En se libérant d’une relation fusionnelle à notre égo, notre existence n’est plus sous le contrôle de nos peurs. Cette libération vient d’une désidentification au besoin d’être le plus fort (stade Rouge), le plus conforme (stade Bleu), le plus efficace (stade Orange), le plus collaboratif (stade Vert). En relâchant l’égo, nous apprenons à avoir moins besoin de contrôler qui nous devons être et commençons à accéder à des parties plus profondes et plus sages de nous-même.

En se reconnectant à un tout plus grand que lui, l’individu du stade Jaune a le sentiment de maîtriser son égo et de pouvoir le mettre au service de quelque chose de plus grand que lui. Avec la maîtrise de l’égo, la peur d’échouer peut s’estomper et les individus peuvent prendre des décisions qui sont parfois perçues comme aventureuses par d’autres stades de conscience. Le sentiment d’être sur la voie de l’expression de notre nature profonde ou de notre vocation est source d’estime de soi, de sentiment de joie, fierté, gratitude et de générosité envers la vie. Percevoir notre vie comme le déploiement de notre nature profonde, nous connecte à notre force intérieure. Le ressenti de plénitude remplace celui du manque et de la compensation liée à notre égo. Notre attention n’est plus focalisée sur ce qui manque chez nous et les autres et la vie, mais sur ce que la vie nous offre de beau et de bon et le potentiel de croissance en chacun. Le sentiment de compassion et d’appréciation peut alors remplacer le jugement. Les aléas de la vie ne sont plus perçus comme une injustice mais comme un moyen d’apprendre quelque chose de nous et de la vie.

En nous identifiant à l’égo nous prenons des décisions sur des facteurs extérieurs en fonction de ce qui va renforcer mon pouvoir (stage Rouge), ou ce qui est conforme aux normes sociales (stade Bleu), ou ce qui est le plus efficace pour réussir (stade Orange), ou ce qui permet d’intégrer et de maintenir une harmonie (stade Vert). Au stade Jaune évolutif, le centre de décision bascule vers l’intérieur (référence Interne pour la PNL) et ce qui importe alors est de rester fidèle à soi-même et à sa mission et de savoir si ses actes contribuent à faire du bien au monde.

Valeurs et organisation sociale

La valeur profonde est l’existence. Elle se retrouve dans la reconnaissance de l’inévitabilité des lois naturelles et de l’incertitude ; la valorisation des systèmes ouvert et de la flexibilité ; l’acceptation des paradoxes et de la complexité ; l’importance du savoir, de la compétence et de la fonctionnalité, la volonté de minimiser son impact sur son environnement.
La vie sociale n’est pas organisée autour de la recherche de plus de reconnaissance, de réussite et de richesse pour bien vivre. Nous cherchons à bien vivre en étant en accord avec nous même et le monde, et en faisant confiance au monde pour nous apporter la reconnaissance, la réussite, la richesse et la satisfaction profonde. La quête de ce qui est juste pour soi nous pousse à une certaine introspection pour découvrir qui nous sommes au-delà de l’égo, de nos rôles sociaux et du regard des autres. Ceux qui évoluent vers le stade Jaune sont souvent des pratiquants de la méditation, du Yoga, des arts martiaux, de la sophrologie ou de l’hypnose ou de la marche dans la nature. Le but est de trouver la sérénité ou la tranquillité qui nous permet de vivre de nouvelles expériences et l’émergence de notre nature profonde et notre connexion au monde et au courant de la vie.

Caractéristiques du stade Jaune

La personne mature est celle qui cherche à être fonctionnelle et flexible dans le cadre de ses principes personnels.
Points positifs : la curiosité et l’ouverture sur le monde, une focalisation sur l’information, la flexibilité, le minimalisme, l’indépendance vis-à-vis des choses matérielles. La personne centrée sur le stade Vert est autonome, responsable et peu exigeante. Si elle apprécie les joies de la vie, les cadeaux, les compliments ou les primes, elle peut tout aussi bien s’en passer, car l’important est ailleurs, et il explique rarement son point de vue.
Points négatifs : la non dépendance peut être perçue comme de la distance ou un désintérêt. L’intolérant face à l’incompétence. L’impression d’instabilité et de versatilité dès qu’il change de cap parce qu’il a trouvé une manière plus fonctionnelle de faire les choses.
La communication intervient en donnant de l’information et en explorant des alternatives.

Exemples du stade Jaune

Le stade jaune concerne environ 5% de la population mondiale et aussi 5% du pouvoir.
Les individus centrés sur ce stade seraient difficile à identifier, car leur recherche d’action minimale pour une fonctionnalité maximale les rendent peu visibles, car ils n’aiment pas se mettre en avant pour clamer leurs prouesses ou soigner leur image, car leurs recherches de fonctionnalité les amènent à se centrer si besoin sur d’autres niveaux de la spirale, mais sans s’y attacher. Avec la vision que les êtres humains ne sont pas des problèmes en attente de solution mais des potentiels en attente de déploiement, les changements du stade Jaune vont imprégner de nombreux domaines de la vie, le management, l’éducation, la psychologie transpersonnelle et la santé holistique ou intégrale.
Les organisations du stade Jaune ont mis en place la démocratie stratifiée (Sociocratie)

Les organisations “familliales” centrées Jaunes

« Pas plus que le bonheur, on ne peut poursuivre la réussite ; elle doit « s’ensuivre » et elle ne s’ensuit que comme effet secondaire non prémédité de notre engagement en faveur d’une cause qui nous dépasse » Viktor Frankl

La maîtrise de l’égo au stade Jaune peut avoir d’importantes répercussions sur la façon de structurer et de diriger les organisations. Car bien des pathologies (concentration du pouvoir, luttes de pouvoir, contrôles, décision au sommet, manque d’authenticité et d’empathie, incapacité à voir et affronter les problèmes) des entreprises actuelles découlent des peurs de l’égo. Peur de ne pas avoir assez de profits, de ne pas avoir une position dominante, de perdre le contrôle d’un système…etc. Les syndicats sont nés de la volonté de fédérer le pouvoir à la base pour faire contrepoids à celui du sommet. Quand la confiance peut remplacer la peur, le besoin illusoire de maîtriser le futur peut perdre sa raison d’être. Les grands rituels d’entreprises (objectifs annuels, réunions d’évaluation, comptes de résultats trimestriels et analytiques, prévisions budgétaires..) ne font alors plus aucun sens. Le dirigeant centré Jaune est souvent décrit par ses qualités d’humilité, de conscience et d’authenticité. Fréderic Laloux décrit une douzaine d’entreprises qui fonctionnent déjà dans le paradigme Jaune.

Si la métaphore des organisations du stade Bleu était une armée, celle du stade Orange une mécanique, celle du stade Vert une famille, la métaphore la plus souvent citée pour le stade Jaune est un organisme vivant. Car un système vivant est auto organisé, il est naturellement doté d’une force de croissance et d’évolution, il poursuit ses propres buts, il sait ce qui est bon pour sa croissance et il vit en harmonie avec son environnement, il établit des synergies avec d’autres systèmes vivants. De même que chaque cellule est capable de reproduire et de faire grandir l’ensemble du système, chaque membre de l’organisation est en mesure de recréer le système. Le vivant n’a pas besoin d’être dirigée, planifié et contrôlé mais d’être protégé et entretenu. Contrairement au système vivant, un système mécanique n’a pas d’âme. Toute entreprise possède une âme et une force de vie qui lui est propre. Et face à un système vivant, le choix du dirigeant est de se mettre à l’écoute de cette âme pour la laisser s’exprimer et se déployer, ou de la nier ou la tuer par une vision mécanique de l’organisation. Pour Frédéric Laloux, les entreprises du stade Jaune (Opale chez Wilber) font apparaître trois avancées majeures.

L’auto gouvernance : devant le constat que c’est la distribution inégale du pouvoir qui est à l’origine de l’absence générale de motivation, les organisations pluralistes vertes vont décentraliser les décisions et autonomiser les salariés. Les organisations Jaunes vont donner du pouvoir à tous, en fonctionnant sur la base de relations d’égal à égal, sans recherche de consensus et en dehors de toute hiérarchie. Dans les structures Jaune importantes, les équipes travaillent de façon autonome et un coach apporte une aide si besoin ; la plupart des fonctions classiques (RH, achats, finances…) sont assurées au sein des équipes ; Il n’y a pas de réunion de direction mais des réunions de coordination en fonction des besoins ; Les titres et statuts sont absents et les définitions de fonctions souples.

L’affirmation de soi : après la valorisation de la force (Rouge), de la conformité de la pensée et de l’action (Bleu), de la rationalité (Orange) ou la bienveillance (Vert) comme mode de fonctionnement, les entreprises Jaunes vont valoriser l’intégrité et l’authenticité des individus. Il n’est plus nécessaire de porter un masque ou d’avoir la tête de l’emploi au travail. Vous pouvez venir travailler en étant vous-même, avec l’ensemble de vos qualités et défauts et votre propre complexité. Les valeurs jouent un rôle important en permettent de créer un environnement de sécurité. Elles sont traduites en règles du jeu explicites, définissant ce qui est acceptable ou inacceptable.

La raison d’être évolutive : l’entreprise est considérée comme une entité vivante dotée d’une conscience de la direction dans laquelle elle s’engage. Cette direction, la raison d’être de l’entreprise ou sa vocation est explicite et connue de tous. Elle donne un cadre aux salariés pour faire émerger les stratégies par l’intelligence collective. Au lieu de vouloir maîtriser l’avenir, on demande aux collaborateurs de définir ce qu’ils veulent devenir et le futur qu’ils veulent créer. Les nouveaux collaborateurs sont invités à réfléchir à leur propre vocation et à vérifier si elle est alignée avec celle de l’entreprise.

Stade Communion- Paradigme Turquoise

SD8 turquoise couleurSD8 Turquoise

Tout en s’affirmant et en se sentant connecté aux autres, l’individu centré Jaune va réaliser que les problèmes auxquels il est confronté ne peuvent être résolus de façon séparée, mais doivent être considérés de façon unique et globale. Il va alors développer une vision holistique du monde et intervenir dans ce cadre de la globalité. Clare Graves disait n’avoir rencontré que quelques personnes vivant dans ce paradigme Turquoise. Et c’est à partir de peu de modèles que Graves en propose une description.

Vision du monde Turquoise : la globalilté

Conditions de vie : le monde est mystérieux par le réseau de composants interdépendants qui le forment. La complexité des problèmes interdisant tout espoir de solution individuelle, seule une solution collective. Il convient donc de recréer une tribu, celle du village mondial. Se sentant connecté à tout, l’être humain centré en Turquoise veut restaurer l’harmonie naturelle du monde. Comme les autres membres de sa tribu, il est prêt à sacrifier son identité pour assurer la continuité de la vie.

Thème : sacrifier ni nécessaire le soi et celui des autres pour le bien de toute vie présente et à venir.

Pensée et développement cognitif : la pensée holistique

L’individu centré Turquoise développe une forte dimension spirituelle. Elle est à l’aise avec les concepts de paradoxe, le hasard et le chaos. Elle valorise la connaissance en regrettant ses limites cognitives et techniques (informatiques) pour comprendre la complexité du monde. Il a une conscience de son identité personnelle, mais n’y attache aucune importance car son attention est « mondiocentique ».

Valeurs et organisation sociale

Valeurs profondes : expérimentation et communion avec le tout. L’individu centré Turquoise recherche l’unité et la connexion avec toutes choses, fonctionne en réseaux mondiaux, veut restaurer l’harmonie globale, cherche à vivre en consommant le minimum de ressources, intervient à des niveaux multiples. La vie sociale du sujet centré Turquoise et celle d’un habitant d’un organisme holistique. Les conditions de vie nécessaires à l’émergence à grande échelle de ce stade Turquoise restent encore inconnues.

Caractéristiques

La personne mature est celle qui cherche à être un être humain conscient de ses responsabilités vis-à-vis de la communauté humaine et de la terre
Points positifs : la personne est concernée par ce qui se passe dans le monde, la pensée à la fois globale et spécifique, son expérience est empirique
Points négatifs : la personne peut sembler déconnectée du quotidien, irréaliste.

Exemples

Les premières expressions du Turquoise sont apparues dans les domaines scientifiques et philosophiques. Par exemple James Lovelock (1919-) a formulé en 1969 l’hypothèse Gaïa. Elle consiste à considérer la terre comme un gigantesque organisme vivant autorégulé pour assurer son homéostasie. la population centrée sur ce stade serait de 0,5 % et représenterait 0,5 % du pouvoir..

Les apports du modèle de Graves à l’entreprise

C’est peut-être dans une transformation intérieure radicale et dans le passage à un autre état de conscience que réside notre seul espoir véritable de sortir de la crise où nous a plongé la domination du paradigme mécaniste occidental” Stanislav Grof

Jamais au cours des siècles précédents, nous n’avions vu cohabiter étroitement et dans le même temps, autant de différents systèmes de valeurs issus de cultures différentes. Et ces systèmes de valeurs cohabitent dans le monde, dans chaque société, dans chaque ville,  dans chaque entreprise, et chez chaque individu.

SD Chrono

Dans les entreprises des pays développés, les organisations du stade Impulsif/Rouge ont pratiquement disparues (sauf dans les organisations criminelles);  le Conformisme/Bleu est encore très présent dans les institutions religieusezs, militaires, éducatives et administratives; le paradigme Réussite/Orange prédomine encore dans la plupart des entreprises; le paradigme Pluraliste/Vert est déjà présent dans de nombreuses ONG et s’installe dans le monde des afffaires; et enfin le paradigme Adaptatif/Jaune pointe son nez dans des entreprises “libérées” et fait l’actualité par l’insolence de leur réussite humaine et financière.

Une entreprise évolue dans un environnement économique et social particulier et donc interagit avec cet environnement. La compréhension de ces interactions est cruciale pour l’entreprise et pour ses dirigeants. Une compréhension qui peut être abordée à différents niveaux : un niveau de surface qui se rapporte aux valeurs affichées par les individus, et un niveau plus profond qui se rapporte aux valeurs inconscientes qui organisent la vie des individus et des organisations, des valeurs qui sont liées à des niveaux d’existence et de conscience, des valeurs qui conditionnent les aspects sociologiques, cultuels et comportementaux des individus. Comprendre les clés des moteurs humains est indispensable pour une entreprise. Et quand l’environnement (ou les conditions de vie) change aussi vite, c’est même une question de survie.

Le modèle de la Spirale Dynamique possède de nombreuses applications pertinentes dans l’entreprise, car il apporte les clés indispensables à la compréhension d’un monde qui change si vite, et auxquelles les entreprises doivent s’adapter. Ceux qui ont su anticipé ces changements sont les grands gagnants d’une nouvelle économie.

La Spirale Dynamique donne une grille de lecture très efficace pour comprendre une entreprise et l’environnement dans lequel elle évolue. Qu’elle est la personnalité ou l’âme de l’entreprise ? Qu’est-ce que la culture de l’entreprise, ses modes de fonctionnements, l’organisation du travail, la vision de son dirigeant, nous disent du niveau d’existence dominant ? Et quel est le niveau d’existence des clients de cette entreprise ? Quelles sont les valeurs profondes qui amènent les clients à utiliser les services et produits de cette entreprise ? La question principale est de savoir si le niveau d’existence de l’entreprise est en mesure de répondre au niveau d’existence de son marché. Le modèle permet également de savoir les attentes futures d’un marché dans un environnement de plus en plus complexe et d’anticiper les réorganisations de l’entreprise.

La Spirale Dynamique peut également être utile pour comprendre les relations interpersonnelles dans le travail. Par exemple, quand des entités (dirigeants, services, départements, entreprises) supposées travailler ensemble s’opposent ou rentrent en conflit, du fait de leurs représentations du monde (niveaux de conscience) totalement différentes. Une compréhension mutuelle des deux représentations, sans vouloir les changer, peut apaiser les tensions, à défaut de résoudre définitivement les conflits. Vouloir faire changer la vision du monde (niveau de conscience) d’une personne (dirigeant ou non) est probablement vouée à l’échec, car selon F. Laloux, « les marches du développement se gravissent au cours d’un processus spirituel, mystérieux et complexe. C’est un processus intérieur que l’on ne peut pas imposer de l’extérieur », même avec les meilleurs arguments. Le changement de niveau de conscience résulte, soit d’une situation de crises, c’est-à-dire de l’impossibilité pour un individu de s’adapter à un nouvel environnement, soit d’un travail de développement personnel et spirituel, et en particulier sur les peurs issues d’un égo non maîtrisé. Il n’y a pas d’égo à supprimer, mais seulement mettre cet égo au service de quelque chose de bien plus grand que lui, au service du monde auquel nous appartenons. Pas toujour simple comme le fait remarquer Laloux « Les dirigeants écoutent avec intérêt jusqu’au moment où ils comprennent quelles fonctions sont en cause et quels pouvoirs ils vont devoir abandonner » Des entreprises qui ont par exemple fonctionné sur un mode Jaune reviennent rapidement à un management conventionnel après l’arrivée d’un nouveau DG qui voit le monde d’un point de vue Orange. La règle générale que rappelle Laloux est que le niveau de conscience d’une entreprise ne peut pas dépasser le niveau celui de son dirigeant.

Si les dirigeants ne sont pas prêts, qu’est-ce qui reste possible ? Heureusement on ne peut rien faire contre la volonté des individus. S’il n’est pas prêt, un dirigeant peut cependant confier la direction à une personne dont le niveau de conscience est plus adapté à celui des clients de l’entreprise. Pour F. Laloux, la transformation verticale (par exemple d’Orange ou de Vert en Jaune) est d’avance vouée à l’échec, si le niveau de conscience de son dirigeant ne s’y prête pas. Il reste donc l’option de la transformation horizontale, par exemple le passage d’une forme pathologique à une forme saine du stade actuel de l’entreprise. Les initiatives qui marchent, qui sont efficaces et qui rendent les individus plus heureux ont le pouvoir de se propager au reste de l’entreprise. C’est la politique des petits pas, et c’est la stratégie des grandes réalisations : déplacer une montagne est bien plus simple si on s’y prend cailloux après cailloux.

Jean Luc Monsempès

Références

La Spirale Dynamique, Fabien et Patricia Chabreuil, InterEditions 2008
Beck, Don Edward ; Cowan, Christopher C. Spiral Dynamics : Mastering values, Leadership, and Change. Oxford, Vlackwell Publisher 1996
Graves, Clare W. The Never Ending Quest. Santa Barbara, ECLET Publishing 2005
Frédéric Laloux. Reinventing Organizations. Vers une communauté de travail inspirées. Editions Diateino 2014
www.spiraledynamique.com , le site de Fabien et Patricia Chabreuil. Il contient une présentation succinte du modèle, des articles et une liste de liens.
www.spiraldynamics.org, le site principal de Christopher Cowan
www.spiraldynamics.net, le site principal de Don Edward Beck
Journal Intégral : http://journal-integral.blogspot.fr/2016_01_01_archive.html

Partager:

administrator