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Jean Luc Monsempès, à partir du matériel de Robert Dilts

L’intelligence collective apparaît en filigrane dans tous les enjeux du monde contemporain. Toutes les organisations et ceux qui les accompagnent ont besoin d’intelligence collective pour trouver des solutions innovantes à des situations d’une complexité croissante, réagir plus rapidement aux évolutions des marchés, identifier de nouveaux gisements d’amélioration de la performance opérationnelle dans une conjoncture économique incitant à la réduction des dépenses, susciter l’engagement et la motivation des équipes qui ont tendance à s’essouffler. Si vous voulez vraiment changer les choses dans le monde, vous devez coopérer. Car seule la coopération est en mesure de créer rapidement quelque chose de nouveau, de créer un tout plus grand que la somme des parties, et c’est là le premier principe de l’intelligence collective : ensemble nous pouvons créer bien plus que nous ne pourrions faire de façon individuelle. Le principe de l’intelligence collective et de la collaboration générative ne repose pas sur une simple addition ou 1+ 1 = 2, mais plutôt sur une synergie dans laquelle 1+1 = 3 ou bien plus encore. La collectivité permet de créer et d’innover, avec en plus le plaisir d’être ensemble, de travailler et de s’amuser. En tant qu’humain et mammifère, nous avons un profond besoin de relations. Travailler ensemble, nous permet seulement d’être plus efficace et plus productifs, mais aussi de vivre avec plus de joie, d’enthousiasme et d’énergie. Cet article a pour but de montrer comment la PNL (programmation neuro linguistique) de troisième génération, telle qu’elle est enseignée par Robert Dilts, s’avère un outil particulièrement efficace pour mettre en œuvre l’Intelligence Collective, encourager les phénomènes de résonance, de synergie et d’émergence qui constitue le terrain fertile des grandes innovations dont les individus, entreprises et organisations ont tant besoin.

Qu’est ce que l’intelligence collective

L’intelligence est la capacité d’une personne à interagir avec succès avec le monde qui l’entoure, et plus particulièrement dans des situations difficiles et de changement. L’intelligence collective est la capacité partagée du groupe à interagir avec le monde. Et cette intelligence émerge des interactions entre les membres du groupe. Un éco système fait preuve d’intelligence collective quand il est capable de s’adapter au changement. Pour les groupes on parle de synergies, d’écosystèmes résilients, d’équipe à haute performance et de “sagesse des foules”

Les conditions d’émergence de l’intelligence collective

Dans les organisations, l’intelligence collective implique la capacité des membres de l’équipe à travailler ensemble, partager du savoir, penser et agir de manière alignée et coordonnée pour créer et innover. Pour faire plus de la même chose, la présence du groupe n’est pas nécessaire. Un proverbe swahili dit que c’est difficile d’aller quelque part si chacun rame dans une direction différente. Si l’intelligence collective permet d’atteindre de nouveaux niveaux de créativité et de performance, elle nécessite donc une synergie de compétences et un alignement des personnes en direction d’un but commun.

Les interactions et collaborations entre personnes ne produisent pas toutes de l’intelligence collective. De nombreux groupes et organisations ont bien du mal à démontrer, au travers des interactions entre leurs membres, une augmentation d’intelligence. Les foules aux comportements hystériques, les équipes conflictuelles et désorganisées, les familles dysfonctionnelles en sont quelques exemples.

Dans la Silicon Valley, un principe guide les processus d’intégration d’un nouveau membre dans une équipe : « si tu rajoutes une personne à une équipe qui est en train de réaliser un projet, il faut rajouter aussi un délai d’un mois au projet ».  Cela signifie qu’en absence d’intelligence collective, l’intégration d’une nouvelle personne peut ralentir le projet au lieu de l’accélérer. Donc rien n’est inéluctable car il est tout à fait possible d’intégrer rapidement des personnes nouvelles dans un groupe pour travailler d’une manière alignée. Pour que les interactions entre personnes puissent produire de l’intelligence collective, elles nécessitent une communication ouverte, une confiance réciproque, une curiosité et un engagement envers quelque chose de plus important que soi-même.

Les bénéfices de l’intelligence collective

Les bénéfices de l’intelligence collective sont individuels et collectifs
Les membres du groupe grandissent plus rapidement.  En collaborant avec les autres on grandit plus vite qu’en travaillant seul.
L’organisation améliore ses capacités créatives et ses capacités à résoudre les problèmes, par un accès facilité à la connaissance, l’intégration rapide de nouveaux savoirs et une potentialité des multiples expertises. L’accumulation et l’intégration des savoir-faire et des compétences individuelles, servent de plateforme pour le développement de nouveaux éclairages, nouvelles idées et capacités. Les autres bénéfices de l’intelligence collective sont :

  • soutenir le fonctionnement sain des groupes et des communautés,
  • participer à la revitalisation des équipes et des organisations,
  • favoriser l’innovation, la productivité et les bénéfices,
  • faciliter la résolution des conflits sociaux et environnementaux,
  • faciliter des prises de conscience et inspiration aux individus et aux groupes,
  • guider vers de puissantes expériences au niveau transpersonnel,
  • se diriger vers les tendances futures, bien mieux que ne le feraient des experts,
  • encourager l’émergence de nouvelles formes d’organisations sociale.

Trois formes d’intelligence au service du projet commun

Pour la Programmation Neuro Linguistique (PNL), l’Intelligence Collective émerge d’un « champ relationnel » créé à partir des systèmes nerveux des personnes en présence, et une direction commune qui intègre et transcende les systèmes nerveux individuels. Cela implique l’alignement et l’intégration de plusieurs formes d’intelligence :

  • l’intelligence intellectuelle, qui provient du mental cognitif, et qui repose sur la logique, le langage et la linéarité,
  • l’intelligence émotionnelle, qui provient du mental somatique situé dans le corps,
  • l’intelligence relationnelle et systémique, qui provient du champ mental qui émerge de nos connexions avec les personnes de notre entourage.

Lorsque les conditions qui produisent l’Intelligence Collective sont réunies, les individus qui étaient au départ comme des éléments séparés, commencent à s’organiser en un groupe cohérent et aligné, et à créer une équipe dans laquelle le tout est plus grand que la somme des parties, un peu comme l’hydrogène et l’oxygène se combinent pour former la troisième entité que constitue l’eau.

Nous communiquons de nombreuses manières différentes. Dans les organisations et les entreprises, la communication se limite le plus souvent à un échange rationnel et cognitif. Comme nous le soulignons avec le regard de la PNL, le canal rationnel est un canal de communication fort limité, car il crée des omissions, des généralisations et des distorsions à propos de ce que nous voulons exprimer ou des messages que nous recevons.

Pour enrichir le canal de communication, nous avons besoin d’y inclure des modalités non verbales, par exemple somatiques et visuelles, et aussi un langage non littéral comme le langage symbolique et métaphorique. Car pour créer de l’intelligence collective on a besoin de bien plus qu’une pensée cognitive. On a besoin d’intelligence émotionnelle, d’intelligence sociale et relationnelle, et aussi de beaucoup d’imagination, surtout si on tente de collaborer de façon créative.

Comme le disait Einstein, l’imagination est plus importante que la connaissance. Car la connaissance ne peut vous décrire que ce qui existe déjà, mais ne peut pas vous parler de ce qui n’existe pas encore et de qui est possible. Imaginer le futur en y projetant ce qu’on connaît déjà et qui vient du passé, nous n’obtenons qu’une extension de ce que nous savons et comprenons déjà.

Les réponses aux besoins d’innovations de ruptures qui vont changer la donne, ne peuvent venir que des échanges basés sur l’imagination et le plus souvent d’une pensée non littérale. C’est par exemple ce que fait la poésie en utilisant bien plus le langage de l’hémisphère droit que celui de l’hémisphère gauche. Et pour faire émerger l’intelligence collective, nous avons besoin de bien plus que les capacités du cerveau gauche, nous avons besoin du cerveau tout entier, mais vous aurez également besoin de l’intelligence émotionnelle, de l’intelligence du corps qui en lien avec l’hémisphère droit.

L’intelligence émotionnelle est selon Daniel Goleman, « La capacité à détecter ses propres émotions et celles des autres, à distinguer entre elles, et à utiliser ces informations pour orienter ses propres pensées et actes ». Cette intelligence émotionnelle repose sur la reconnaissance avec justesse de ses propres sentiments et ceux des autres, et la capacité à gérer les émotions présentes en nous-mêmes et dans nos relations.

Le poète Irlandais David White s’est donné pour mission d’amener la poésie dans les entreprises car elle stimule une autre forme de communication, ouvre plus de possibilités pour développer l’intelligence sociale et émotionnelle. Ce poème qui s’appelle « Travailler ensemble » a été créé pour l’entreprise d’aviation Boeing pour lesquelles David White travaillait et il fait référence aux avions :

« Nous nous façonnons nous même pour correspondre à ce monde,
et par le monde nous sommes façonnés en retour ;
Le visible et l’invisible travaillent ensemble
dans une cause commune pour produire le miraculeux ;
Je pense à la façon dont l’air intangible
qui passe à toute vitesse autour de l’aile profilée
soutien facilement notre poids ;
Alors puissions nous dans cette vie avoir foi dans ces éléments
qui nous restent à voir ou à imaginer
et trouver notre véritable forme en la façonnant bien
aux grands intangibles qui nous entourent
».

Le poète parle de quelque chose d’invisible et pourtant présent et ce phénomène particulier est ce qu’on peut appeler un « champ », quelque chose qui est énergétique, que vous ne pouvez pas voir, mais qui a un impact sur ce qui se déroule. Comme un champ magnétique que vous ne pouvez voir mais dont vous pouvez sentir la présence par les résultats produits. Comme le vent que vous ne pouvez voir mais dont vous voyez les effets. Comme les sons que vous ne pouvez voir mais dont vous sentez les vibrations. L’intelligence collective nécessite de travailler avec cette dynamique, avec ce qu’on peut voir et qui est concret et tangible, et ce que vous ne pouvez pas voir, qui est invisible mais qui a tout de même beaucoup d’influence.

La modélisation des facteurs de succès de l’intelligence collective

Une grande partie des processus mis en œuvre dans l’Intelligence Collective et la collaboration générative viennent de la Modélisation des Facteurs de Succès de Robert Dilts (SFM ou Success factor Modeling). La PNL est issue de la modélisation d’individus qui réussissaient, par exemple des psychothérapeutes, des enseignants, des vendeurs, des leaders, des entrepreneurs. La modélisation consiste à observer « ce qui marche » et découvrir « la différence qui fait toute la différence » dans les processus cognitifs, linguistiques et somatiques qui aboutissent à des résultats que l’on souhaite reproduire. Dans la modélisation d’un groupe, on cherchera la différence qui fait la différence entre des équipes qui réussissent et celles qui sont en difficulté.

Un exemple d’excellence en matière d’intelligence collective

Robert Dilts raconte qu’il a participé il y a environ 10 ans à une étude financée par une entreprise française de télécommunication, une étude qui avait pour but de comprendre un échec récent. Cette grande entreprise savait qu’elle devait créer un nouveau produit pour un segment particulier de leur marché, dans un contexte de fortes évolutions technologiques et de concurrence. Le projet était si important que 1000 personnes y ont été assignées. Pourtant un concurrent bien moins important en taille, avec une équipe réduite de 20 personnes, a réussi à lancer rapidement un meilleur produit, de meilleure qualité et moins cher. Alors, comment expliquer qu’une équipe de 20 personnes puisse faire bien mieux qu’une équipe de 1000 personnes, sur tous les indicateurs de performance ?. La réponse était en lien avec l’intelligence collective.

Le groupe de 1000 personnes était dirigé par un leader au style traditionnel qui consiste à attribuer à chacun des missions et des délais en fonction d’un plan précis. Les collaborateurs faisaient leur travail dans leur coin, avec peu d’échanges et de partages, et leur premier objectif était de faire ce qu’on leur demandait de faire. Dans ces conditions, personne n’a pu grandir car ces personnes ont juste mis en pratique leurs connaissances du passé, sans grande énergie ni imagination. Le travail réalisé s’est appuyé bien plus sur une intelligence collectée (1+1 =2) que sur une intelligence collective (1+1=3).

Le chef de projet du groupe des 20 personnes donnait surtout une direction, à partir des critères attendus par le marché, partageait une vision, suscitait de l’enthousiasme, facilitait les échanges et donnait peu d’instructions précises. Par leur collaboration, les personnes échangeaient en permanence sur de nouvelles possibilités, et de nouvelles idées auxquelles personne n’avait pensé faire émerger. Ce groupe de personnes travaillait avec les principes de la collaboration générative facilitant ainsi l’émergence de quelque chose de totalement nouveau.

Il n’y a pas de taille critique pour que l’Intelligence Collective émerge. Tout va dépendre des résultats attendus et du processus mis en œuvre. Les plus petits groupes peuvent être composés de 3 à 5 personnes. Plus la collectivité est grande plus les choses émergent, et c’est la raison pour laquelle on parle de la sagesse des foules. Quand Steve Jobs commençait à travailler sur une idée, il le faisait avec un groupe d’une centaine de personnes, puis il travaillait avec des sous groupes au sein de ce grand groupe. Un des facteurs limitant par rapport au nombre est le temps car le partage entre 1000 personnes nécessite bien plus de temps. Avec les grands groupes, nous avons besoin de travailler avec des représentants, en s’assurant qu’il représente bien un sous-ensemble.

Dans une grande entreprise, on travaillera avec le comité de direction, composé de cadres dirigeant représentant différentes parties de l’entreprise, les R&D, la production, la finance, le marketing, les ventes. Ces dirigeants sont censés représenter la totalité des membres de l’entreprise. Les choses se compliquent quand ceux qui sont censés représenter un tout ne le font pas et se représentent surtout eux mêmes et leurs propres intérêts (pouvoir, argent, égo…etc)

Les facteurs de succès de l’intelligence collective

Pour permettre d’accélérer un processus d’innovation, faciliter l’émergence de quelque chose de totalement imprévu comme cela s’est passé dans le groupe des 20 , le monde des organisations a fondamentalement besoin d’accroître les interactions au sein des équipes.

Dans une démarche de Modélisation des Facteurs de Succès (SFM), on porte son attention sur trois aspects du fonctionnement individuel ou de groupe :

L’état d’esprit : la mise en place d’une collaboration générative et de l’intelligence collective implique un changement d’état d’esprit. Si le chef de projet et ses 1000 collaborateurs avaient un état d’esprit focalisé uniquement sur la réalisation de leur objectif, le groupe des 20 personnes et leur chef de projet avaient un état d’esprit complétement différent, en rapport avec la confiance, le partage et une communication permanente.

Les actions : l’état d’esprit organise et structure la mise en oeuvre d’actions particulières, autrement dit ce que vous pensez impacte ce que vous faîtes, et en particulier votre manière d’échanger et de communiquer.

Les résultats : ces actions produisent certains types de résultats et la question est ici de savoir ce que vous voulez atteindre ou réaliser.

Donc un état d’esprit génère des actions qui aboutissent à des résultats. Dans une démarche de modélisation de l’intelligence collective, on va s’intéresser à ces trois facteurs : trouver des modèles de réussite en matière d’intelligence collective, décrire les résultats réalisés et les actions mises en œuvre par ces modèles, puis se demander quel type d’état d’esprit a pu organiser cette excellence.

L’état d’esprit qui favorise l’intelligence collective

Steve Jobs incarne parfaitement cette capacité à mettre en oeuvre l’intelligence collective et la collaboration générative, car si on met de côté ses traits de personnalité souvent contestés, il a très bien réussi à faire collaborer ses équipes de manière intelligente et créative.

Robert Dilts cite Apple comme son premier “client entreprise” en 1981 et depuis 30 ans il y a réalisé de nombreuses missions. « Si vous demandez aux collaborateurs d’Apple comment c’était de travailler avec Steve Jobs, la plupart d’entre eux disent que ce n’était pas facile, du fait de la personnalité de Steve Jobs, avec des hauts très hauts et des bas très bas. Mais si on leur demandait s’ils travailleraient avec lui à nouveau, ils disaient oui, absolument. » Alors pourquoi travailler à nouveau avec une personnalité si difficile ? Voici ce que répondaient ces collaborateurs :

« Parce que ces interactions m’ont permis de grandir, j’ai fait émerger en moi des choses que je ne pensais pas avoir et cela m’a permis de contribuer à quelque chose qui allait changer le cours du monde, donc cela valait vraiment le coût »

Des dynamiques collectives peuvent en effet transcender des dynamiques individuelles. Nous savons par exemple dans le domaine du sport, que réunir les meilleurs joueurs ne signifie pas avoir la meilleure équipe. Et nous savons également que si nous amenons une personne considérée comme « difficile » dans une équipe forte, elle peut dans certaines conditions grandir et changer. Donc l’état d’esprit comporte des questions telles que « Pour quelles raisons suis-je là ? »

Comme le disait Steve Jobs « Etre l’homme le plus riche du cimetière ne m’intéresse pas, par contre aller me coucher le soir en me disant qu’aujourd’hui on a fait quelque chose de merveilleux ensemble, c’est cela qui m’intéresse ».

Nous entendons ici des réponses sur deux types distincts d’état d’esprit : le premier concerne uniquement Steve Jobs et ce qui lui permet de réaliser ce qu’il veut ou ne veut pas pour lui même ; alors que le second concerne Steve Jobs et d’autre personnes « ensemble nous avons créé quelque chose de merveilleux pour le monde ».

Le premier type d’état d’esprit est orienté vers ce que l’on appelle l’égo. Le bénéfice des réalisations est pour soi en tant qu’entité séparé. Ce n’est pas un problème d’avoir un égo et c’est tout à fait normal de se dire « Je veux réussir, je veux être récompensé, je veux être reconnu ». Mais comme Steve Jobs le dit « ce n’est pas ce qui est le plus intéressant ». Le plus intéressant est en rapport avec ce que le groupe ou l’équipe peuvent réaliser ensemble dans le monde et « ce que nous pouvons faire de merveilleux ensemble ». Le type d’état d’esprit évoqué par Steve Jobs s’apparente à ce que nous pourrions appeler « l’âme ».

L’égo recherche un environnement sécurisant, adopte des comportements de façade très respectueux des autres, utilise une pensée stratégique, s’appuie sur des valeurs de responsabilité et de soutien, se perçoit en tant qu’individualité séparée et en croissance, et veut appartenir à un monde délimité par des frontières. L’âme recherche un environnement ouvert dans lequel il pourra adopter des comportements proactifs, exprimer son énergie, s’appuyer sur des valeurs d’engagement, s’identifier au don et à un désir d’appartenir à un monde de connexion et de création.

Le concept de holon, inventé par le romancier Arthur Koestler exprime bien un état d’esprit intégratif, dans lequel tout ce qui existe dans l’univers est à la fois un tout autonome et de plein droit, et une partie d’un système plus vaste. « Cela paraît signifier que chaque holon est animé de deux tendances ou virtualités opposées : une tendance à l’intégration pour fonctionner en tant que partie d’une totalité, et une tendance à l’assertion pour préserver son autonomie individuelle ». «  L’homme n’est jamais une île, c’est un holon. Sa tendance assertive est la manifestation dynamique de son individualité. Sa tendance intégrative exprime sa dépendance à l’égard de l’ensemble auquel il appartient : sa “partiallité”. Quand tout va bien les deux tendances sont en équilibre plus ou moins stable. En période de tension ou de frustration, l’équilibre est rompu, ce qui se manifeste par des troubles affectifs. Les émotions qui naissent de tendances assertives frustrées sont du type adrénergique, agresso-défensif, bien connu »

Par exemple, des atomes sont un tout et en même temps des constituants essentiels de molécules qui assemblés constituent des cellules qui a leur tour constituent des organes qui sont de nouveaux touts. Et chaque être vivant est un tout qui fait partie d’autres touts encore plus vastes, par exemple une famille, une communauté professionnelle, une culture, une planète. Dans cette notion de holon, le tout est aussi à l’intérieur de chaque partie, et chaque partie apporte sa contribution au tout. Par exemple l’ADN présente dans toutes les cellules du corps est un élément indispensable du fonctionnement des autres parties. La présence du tout dans chaque partie et des parties essentielles aux autres touts sont des principes holographique. En travaillant avec un petit groupe, il est utile de voir chaque personne présente comme des holons ou individus séparés et autonomes, et en même temps comme des holons connectés à un ensemble plus vaste représentant la raison d’être de ce groupe. Par exemple une intention, une vision, une mission.

Pour citer Arthur Koestler, « Les émotions provenant de la tendance intégrative naissent dans le holon humain du besoin d’appartenir, de dépasser les frontières du moi, et de faire partie d’un ensemble enveloppant – une collectivité peut être, une foi, une cause politique, la nature, l’art, ou l’anima mundi. »

Les actions qui favorisent l’intelligence collective

Le partage (Sharing), l’essaimage (Swarming) et le rassemblement (Flocking) sont trois processus clés de l’Intelligence Collective et des collaborations génératives.

Partage-échange d’information (sharing) : le président Thomas Jefferson disait que « si deux personnes se rencontrent et échangent un dollar, chacun repart avec un dollar ;   Mais si elles échangent une idée, je te donne une idée et tu me donnes une idée, elles repartent chacune avec au moins deux idées ou même plus, du fait du processus de synergie. Quand on partage, ce n’est pas seulement des idées mais de l’énergie, ou alors on échange des idées de manière différente.

Essaimage (Swarming) : c’est diriger les échanges d’informations et les savoirs vers un but commun, que ce soit la résolution d’un problème ou l’atteinte d’un objectif particulier. On focalise de multiples perspectives sur un même but.

Rassemblement : (Flocking) : c’est se réunir pour s’apporter un 
soutien mutuel. Ce mot est utilisé pour les oiseaux qui se rassemblent afin de créer de la sécurité et améliorer leur performance. Les oies volent ensemble sur des milliers de kilomètres car les battements d’ailes de l’une créée un courant ascendant derrière elle dont l’oie qui suit profite. Pour faire moins d’efforts. Celle qui suit chevauche l’énergie de la première tout en encourageant de ses cris celle qui la précède. Elle utilise son énergie et l’a rend en retour « go, go, vas y ». Les oies qui volent ensemble peuvent ainsi voler deux fois plus loin que ce qu’elles pourraient parcourir en étant seules. Cela est vrai pour tous les oiseaux sauf la première, ce qui veut dire qu’elle doit opérer une rotation périodiquement pour laisser sa place de leader du groupe.

Développer de l’intelligence collective, c’est mettre ces processus en pratique : partager et échanger dans un but commun bien identifié, et en se soutenant mutuellement, tirer un bénéfice des idées et de l’énergie de ceux qui nous entourent et rendre quelque chose en retour pour qu’ensemble nous puissions accélérer ce que nous sommes en train de faire et aller bien plus loin que nous l’avions imaginé.

Dans un groupe qui fonctionne en Intelligence Collective le leadership transcende les individus. Les oies changent de tour car elles savent intuitivement dans quelle direction se diriger. Cette direction, ou la notion d’intention commune, est plus en lien avec une vision qu’un objectif spécifique. Par la vison qu’il apporte, le leadership transcende les individus, car toute personne peut s’avancer pour prendre le lead si nécessaire. Ici, inutile qu’une personne dise aux autres quoi faire, car il y a une direction et un processus sur lesquels on s’est mis préalablement d’accord et que chacun s’accorde à suivre. C’est donc le processus qui guide le groupe plutôt que les individus, et tout individu peut guider le processus à tout moment.

Transcender la personnalité d’une personne ne signifie pas que l’individu ne compte pas et c’est bien ce qui peut paraître paradoxal dans l’Intelligence Collective. Le moi doit être présent et pris en compte car sans individualité il n’y aura pas d’Intelligence Collective. Si la présence de chacun apporte une différence, ce que nous faisons ensemble va bien au-delà du moi. La transcendance signifie qu’il y a un engagement individuel qui va bien au-delà du soi, et la réalisation des buts communs profitera à chaque membre de l’équipe. Philip Douglas Jackson, un ancien joueur et entraîneur de basket-ball, six fois champion NBA avec les Bulls de Chicago et cinq fois avec les Lakers de Los Angeles, disait que la force des individus est l’équipe et que la force de l’équipe ce sont les individus. Il y a donc une dynamique dans laquelle la contribution et la créativité individuelle sont absolument nécessaires, mais la raison d’être du groupe transcende l’égo et la personnalité.

C’est une manière de penser bien différente de celles qu’on utilise habituellement dans l’entreprise. Un dicton dit qu’il n’y a pas de Moi dans l’équipe alors que pour avoir une équipe il faut réunir des individus qui sont complétement eux-mêmes.
Steve Jobs disait que lorsqu’il embauchait, et surtout un sénior, les compétences étaient vraiment importantes, mais la véritable question était de savoir si la personne recrutée allait tomber amoureux d’Apple. Si c’était le cas, il savait que tout prendrait tranquillement sa place, sinon il n’aurait jamais pu savoir si ce candidat travaillait pour lui même, pour Steve Jobs ou pour toute autre raison. En tombant amoureux du tout, alors chacun devient un représentant de ce tout, sinon je reste un individu séparé.

Il en est de même en matière de santé. Un individu est un tout autonome biologiquement et psychologiquement auto-organisé pour fonctionner au sein d’un système plus vaste. C’est l’alignement des différentes connexions entre les parties (du microscopique au macroscopique) qui détermine l’état de santé de la personne. Un élément interne comme des cellules cancéreuses peuvent perturber l’ADN d’une cellule, ou un élément externe comme un virus peut transformer les connexions et l’alignement au sein du système global, générer des modifications physiologiques qui vont se traduire par des symptômes.

Il en est de même dans une entreprise ou une équipe. Quand la raison d’être du holon plus vaste (vision, mission,…) n’est pas connue, intégrée et incarnée par l’ensemble des membres de l’équipe, et surtout par son leader, ce sont les individualités ou les égos qui prennent le dessus. Les individualités/égos/holons qui sont sources d’excellences, ne peuvent être transcendées en l’absence du holon plus grand. Le manque d’intégration va se traduire par un déficit de partage (chacun dans son coin), d’essaimage (perte du sens de la direction commune), et de rassemblement (absence de soutien mutuel et conflits). Le travail réalisé par l’équipe sera limité, comme la distance parcourue par le vol des oies. Une intégration réussie est celle qui respecte les individualités tout en vérifiant constamment, comme dirait Steve Jobs, que ces individualités « tombent bien amoureuses » du projet d’entreprise, et sont ainsi prêtes à « réaliser quelque chose de merveilleux ensemble ». L’échec de l’intégration se traduit par des conflits, un manque d’innovation et des pertes de compétitivité. Les entreprises et les organisations pouvant aussi être affectées par des virus et des cancers, elles doivent apprendre à acquérir un bon système immunitaire. C’est-à-dire la mise en place des mécanismes qui permettent d’identifier et reconnaître l’individu et l’excellence de ses qualités personnelles, tout en vérifiant que ces qualités sont bien plus au service d’un but commun que des intérêts individuels.

Les résultats recherchés qui facilitent l’intelligence collective

La Modélisation des Facteurs de Succès montre que les équipes performantes pratiquent constamment le Benchmarking, les bonnes pratiques, le brainstorming et la collaboration générative.

Le benchmarking : il consiste à établir des standards. Un établi (bench) permet d’y noter des marques ou des mesures. Pour couper une planche à la même taille qu’une autre, vous avez besoin de posez des marques sur cet établi. Le benchmarking consiste donc à établir des standards « ad hoc » qui vont trouver leurs importances quand les choses changent. Les bonnes pratiques sont une manière de créer cette amélioration continue.

Les bonnes pratiques : elles consistent à partager des stratégies efficaces. Car dans un monde qui change, les anciennes façons de faire ne marchent plus et il convient de créer une amélioration continue en partageant des capacités à propos des différences qui ont fait la différence pour chacun.

Le brainstorming : il consiste à produire des idées nouvelles en stimulant les imaginations individuelles.

La collaboration générative : elle va au-delà du brainstorming car elle permet de créer des choses qui semblaient impossible auparavant, ou des résultats qu’on ne pouvait même pas imaginer.

Jean Luc Monsempès, à partir du matériel de Robert Dilts pour Institut Repère

Références  : Collaboration Générative: Libérer La Puissance Créative de l’Intelligence Collective; 20 avril 2018, de Robert Brian Dilts et Antonio Meza

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