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par Jean Luc Monsempès

Les démons ou ombres sont des émotions et parties de nous-même dont nous nous sommes déconnectés et auxquelles nous ne voulons faire face. Des démons qui se manifestent dans les périodes de transitions, dont la présence se manifeste par la peur ou la souffrance et qui s’opposent à notre croissance. Le rôle du coach est d’aider son client à trouver les ressources nécessaires pour changer son rapport avec ses peurs, et vivre avec une plus profonde connexion et confiance. Cet article, qui s’est inspiré du livreTsultrim Allione « Nourrir ses démons. Utilisez la sagesse ancienne pour résoudre vos conflits intérieurs », montre comment un processus tibétain de guérison peut être très proche de la pensée moderne de la PNL.

Des démons au double visage

Dans la religion chrétienne, le terme de démon a acquis, de la part des ecclésiastiques, le sens d’ange déchu, d’esprit du mal ou de diable (Wikipédia). Au Moyen Age, on rendait les démons responsables de toutes les catastrophes, et on les craignait comme l’incarnation du mal. Mais ce mot n’a pas toujours eu une signification négative. Le démon (daimon) grec était une créature divine, un esprit guide fiable et digne de confiance, un « dieu », inspirateur de la destinée d’un homme ou d’une collectivité. Cette vision ancienne du daimon a donc bien évoluée. Démon ou daimon sont comme les deux facettes d’une énergie qui selon les situations va s’opposer ou faciliter la réalisation de nos aspirations les plus chères. Toute la question est donc de savoir comment transformer nos ennemis en alliés. Le démon devient parfois dragon, comme métaphore de nos sentiments difficiles. Jung a qualifié d’ombre cet aspect inconscient du fonctionnement humain. Une ombre qui ne peut exister que par absence de lumière. La PNL a de nombreuses techniques à proposer dans ce domaine, mais le bouddhisme tibétain également, au travers d’une stratégie efficace qui mérite d’être connue et qui a plus de 1000 ans.

Gandhi nourrit son ennemi et change le cours de l’histoire

Gandhi devait recevoir la visite d’un représentant de la Grande Bretagne qui le menait de le jeter en prison s’il ne renonçait pas à ce que les Anglais considéraient comme une activité subversive : une marche de protestation contre la taxe sur le sel imposée par la Grande Bretagne. Un conseiller proposa à Gandhi de jeter des clous sur la voie qu’emprunterait la voiture du représentant Britannique. « Vous n’en ferez rien répondit Gandhi. Nous l’inviterons à prendre le thé ». Déçus, ses partisans lui ont obéi. L’anglais est arrivé, l’air solennel et déterminé. « Monsieur Gandhi, cette marche du sel doit cesser immédiatement, faute de quoi, je serai dans l’obligation de vous mettre en états d’arrestation » ; « Bien répondit Gandhi, mais commençons par prendre le thé ». L’anglais accepta l’invitation à contrecœur. Une fois sa tasse vide, il s’est empressé de dire : « Revenons au but de ma visite. A propos de ces marches… » Gandhi a souri. « Pas tout de suite. Prenez encore un peu de thé et des biscuits ; il y a des choses plus importantes à discuter»

La conversation s’est poursuivie. L’Anglais s’est montré de plus en plus intéressé par ce que Gandhi avait à dire, a bu d’autres tasses de thé et croqué d’autres biscuits, jusqu’à ce qu’il en oublie le but de sa visite et s’en retourne, gagné à la cause de Gandhi. Au moyen du thé, rituel typiquement Anglais qui implique la courtoisie et le respect mutuel, Gandhi a littéralement nourri son ennemi jusqu’à ce qu’il se transforme en allié. Sa tactique-nourrir l’ennemi plutôt que de le combattre a contribué à changer le cours de l’histoire de l’Inde. (Histoire relatée dans le livre de Tsultrim Allione « nourrir ses Démons »)

Le mythe du « tueur de dragons »

Nourrir ses ennemis plutôt que de les combattre pour s’en faire des alliés peut sembler bien inhabituel ou même à l’opposé de la tradition occidentale d’aborder les difficultés individuelles ou collectives. Vis à vis de ces difficultés, le langage guerrier est de mise. Nous luttons contre la maladie, nous combattons la pauvreté, la faim, les tyrans. Cette lutte comporte pourtant plusieurs dangers : celui de la diabolisation de l’adversaire vite associé au mal, celui de la polarisation du bien et du mal, et celui de la justification de la violence pour anéantir définitivement cet adversaire. Nos héros du monde occidental sont à l’image d’Hercule, des « tueurs de dragons », des dominateurs du monde extérieur et intérieur. Ce mythe du « tueur de dragons » est omniprésent dans les événements politiques, religieux, sociaux, économiques, culturels ou écologiques. Les héros des films les plus populaires du cinéma américain mènent un combat sans merci contre le « côté obscur de la force ».

Le mythe du « tueur de dragon » est présent dans le monde extérieur comme dans le monde intérieur. Le dragon symbolise alors les désordres intérieurs que l’homme doit apprendre à contrôler ou vaincre. Nos démons sont ce que nous craignons, ce qui mine nos meilleures intentions, ce qui réduit la liberté intérieure. Ces démons intérieurs sont le stress, l’obésité, la maladie, nos traumatismes, nos sentiments de haine de soi ou des autres, nos multiples dépendances (alimentation, alcool, tabac, travail, aspect physique…etc.). Nous nous enlisons progressivement dans une lutte épuisante qui consomme toute notre énergie et qui peut nous détruire.

D’où viennent ces dragons ? Au cours du processus de création d’une carte de nous-même (le concept de soi), nos systèmes de croyance nous imposent certaines caractéristiques (pensées, comportements, émotions, rôles,…), en jugeant certains éléments comme positifs et d’autres comme négatifs. Les éléments considérés comme positifs deviennent l’objet d’identification. Ils représentent ce que nous souhaitons être ou devenir et vont ainsi former notre « soi idéalisé » ou notre « ego ». Les éléments perçus comme négatifs constituent ce que nous ne voulons pas être et vont devenir des « ombres », ou des « dragons ». Carl Jung a qualifié d’ombre ce côté caché de l’être humain susceptible d’apparaître dans les rêves ou d’être projeté sur les autres. Nous sommes souvent inconscient de notre part d’ombre, notre esprit conscient ne pouvant la voir. L’ombre nous incite à trop manger, trop travailler, trop contrôler, insulter une personne, se sacrifier pour les autres, renoncer à nos rêves, faire du sauvetage…etc.

L’ombre d’un individu ou d’un groupe est composée des pensées, émotions, comportements verbaux ou non verbaux, considérés comme inacceptables. L’ombre c’est le soi réprimé, ce que nous souhaitons cacher aux autres. Lorsque nous n’acceptons pas ces aspects de nous-même, nous leur refusons toute possibilité d’intégration au reste du système, le nôtre ou celui du groupe. Cette perte de relation avec les autres parties du système est source de conflits. Cette lutte interne mobilise toute notre énergie, celle qui n’est plus disponibles pour réaliser nos projets.

Les dragons pointent leur nez dès lors des périodes de transition, dès que nous souhaitons quitter un état présent insatisfaisant pour aller vers un état désiré. Le démon représente l’ensemble des résistances et interférences qui s’opposent à la réalisation de nos buts. Les démons nous soumettent à la tentation ou nous nient dans notre position de héros. Les « démons » représentent une énergie qu’il nous faut apprendre à confronter, accepter et rediriger. Nos démons sont souvent le reflet des peurs générées par des messages inhibiteurs qui s’opposent à notre mission d’humain. Stephen Gilligan les appelle des messages de « parrainage négatif » : par exemple, « Tu ne devrais pas être là », « Tu ne mérites pas d’exister », « Tu es incapable », « Tu ne seras jamais assez bien », « Tu n’es pas le bienvenu », etc.  Pour faire face à ces démons, nous avons besoin de ressources particulières, des ressources capables d’accueillir, intégrer, connecter, générer quelque chose qui n’existait pas encore

Créer une relation avec nos sentiments difficiles

Dans la mythologie, le dragon/démon est souvent le gardien d’un trésor secret.  Nourrir ses démons présuppose une rencontre ou même une confrontation avec ce qui était dans l’ombre. C’est amener ses démons dans la lumière de son esprit conscient. Avec cette prise de conscience, nous pouvons réaliser que ces démons ne sont que des constructions du mental, des processus de pensée (les omissions, généralisations, distorsions) qui bloquent le développement d’une conscience claire. Et dès que nous pouvons reconnaitre la nature illusoire de notre expérience du monde, les démons sont immédiatement libérés. Une fois ramenée à l’esprit conscient, l’ombre libère l’énergie vitale qu’elle emmagasinait et perd ainsi son pouvoir clandestin de destruction de nos bonnes intentions. Nous commençons à combler le fossé imaginaire séparant le « bien » du « mal ». Nourris, nos démons se transforment en allié. L’énergie des émotions emprisonnées dans les conflits intérieurs est libérée et se transforme en force protectrice.  Nous accédons à notre propre trésor, cette énergie enfin disponible pour la réalisation de notre mission d’humain. Cette énergie que nous dépensions à éviter ce sentiment difficile, nous permet d’être plus présents à nous-même et aux autres. La lutte que nous menons contre certains aspects de nous-même renforce ces derniers, développent leur puissance et leur niveau de résistance. Regarder en face son ennemi, puis l’accueillir comme un hôte de marque pour le nourrir constitue un changement de paradigme, le passage de la domination à l’intégration.

Nourrir ses dragons est une métaphore d’un nouveau mode de relation entre nous même et un sentiment difficile. Nourrir ses dragons, c’est comme accueillir son ennemi. Accueillir ou nourrir ses dragons, c’est apprendre à créer une relation positive avec nos sentiments difficiles. C’est celui qui accueille qui a besoin de ressources. Car il s’agit d’accueillir avec amour et compassion. On peut par exemple prendre l’exemple de la mère qui tient son bébé dans ses bras pour accueillir ses pleurs et ses douleurs. La mère représente le soi conscient, une présence à soi qui n’est pas prisonnière de l’émotion difficile, et le bébé représente le sentiment difficile, la pensée limitante qui nous habite. Une émotion difficile est comme un enfant effrayé. Elle a besoin d’être accueillie. Un accueil qui permet aux sentiments, tout comme l’enfant, de passer d’un état de séparation/contraction à un état de connexion/relaxation. On ne cherche pas à se débarrasser des sentiments difficiles, on entre en relation avec eux d’une manière qui leur permet de se transformer.

Nourrir les dragons et bouddhisme tibétains

L’approche qui consiste à donner forme à ces forces intérieures et à les nourrir au lieu de les combattre a été formulée il y a plus de mille ans par une nonne bouddhiste Machik Labdrön (1055-1145). Sa pratique spirituelle était appelée « chod », ce qui signifie « trancher ». Cette forme de méditation a donné des résultats si étonnants qu’elle est devenue extrêmement populaire  et qu’elle s’est répandue dans toutes les écoles du Bouddhisme tibétain.

La méthode présentée plus loin est extraite de l’ouvrage de Tsultrim Allione « Nourrir ses démons, utilisez la sagesse ancienne pour résoudre vos conflits intérieurs » Cette méthode, qui est fondée sur les principes de la pratique du « chod » comprend cinq étapes simples et ne nécessite aucune connaissance du bouddhisme ou d’une pratique tibétaine. Cette technique efficace et naturellement écologique est une « métaphore opérante ». Le praticien PNL s’y retrouvera pleinement. Cette technique est empreinte d’une grande modernité, et aussi d’une grande sagesse. Ce qui est efficace semble être au-delà du temps et des cultures. Ce qui marche depuis toujours, ce sont les contes et mythes, qui nous parlent de ce qui est profondément enfoui au plus profond de notre humanité.

Première étape : rechercher la localisation somatique du démon. Ou ressentez-vous la présence du sentiment difficile dans votre corps ?  
Deuxième étape : laisser l’énergie du sentiment s’incarner dans un démon. Créer une gestalt ou une représentation métaphorique de ce démon face à vous.
Troisième étape : découvrir ce dont le démon à besoin en adoptant une seconde position, en devenant ce démon.
Quatrième étape : répondre au besoin du démon en imaginant que le corps « se dissout en un nectar » correspondant à ce dont le démon a besoin, et laisser le démon s’en abreuver jusqu’à ce qu’il soit repu. Puis constater que l’énergie mobilisée par le démon est devenue une alliée. Cette alliée nous protège, nous soutient, puis se dissout en nous. La dissolution du corps est métaphoriquement celle de l’égo.
Cinquième étape : se relaxer dans l’état de conscience ouverte.

La stratégie « Nourrir ses démons » de Tsultrim Allione

Ce protocole reprend celui présenté par Tsultrim Allione dans son ouvrage « Nourrir ses démons. Utilisez la sagesse ancienne pour résoudre vos conflits intérieurs ». Ce protocole comporte des apports du langage PNL concernant les modalités et sous modalités sensorielles ainsi que les positions de perception.

Etape de préparation

Respirer : « fermez les yeux et gardez-les fermés jusqu’à la fin de la cinquième étape. Prenez neuf profondes inspirations abdominales, suivies de longues expirations. Durant les trois premières inspirations, imaginez que l’air inspiré se rend jusqu’au point de tension physique qui se trouve dans votre corps ; relâchez ensuite cette tension durant l’expiration. Les trois fois suivantes; imaginez que l’air inspiré se rend jusqu’à l’endroit de votre corps ou vous sentez une tension émotionnelle ; relâchez ensuite cette tension durant l’expiration. Durant les trois dernières inspirations, dirigez l’air inspiré à l’endroit où se cache une tension mentale, par exemple une nervosité, des soucis ou des blocages mentaux. Relâchez-les en expirant ».
Motiver : trouvez en vous une motivation authentique: Cette pratique vise votre bien être et celui de tous les êtres.

Première étape : trouver le démon

Décidez du démon (sentiment difficile) sur lequel vous voulez travailler.
Définissez l’endroit où le démon est retenu dans votre corps et intensifiez la sensation.
Prenez conscience des caractéristiques des sensations physiques (les sous modalités kinesthésiques : localisation, diffusion, chaleur, pression, texture…etc.)

Deuxième étape : donner forme au démon et demander ce dont il a besoin

Incarnez la sensation sous la forme d’un être doté des attributs d’un humain (bras, de jambes, visage, yeux, oreilles…etc.)  ;  regardez le démon devant vous. Si un objet inanimé apparaît, imaginez à quoi il ressemblerait s’il avait l’aspect d’un être animé. Notez les modalités et sous modalités sensorielles (couleur, texture de sa peau, de sa taille, de son caractère, de son état émotionnel, de son regard et de tout ce qui a pu vous échapper la première fois.

Posez trois questions au démon : Que veux-tu de moi ? De quoi as-tu besoin chez  moi ?  Comment te sentiras-tu si tu obtiens ce dont tu as besoin ?
Adoptez la position du démon (deuxième position), dès que vous avez posé les trois questions.

Troisième étape : devenir le démon

Devenez le démon : adopter son système de perception. Prenez un instant pour vous adapter à votre nouvelle identité.
Percevez-vous avec le système de représentation du démon
Répondez aux trois questions : Ce que je veux de toi, c’est … ; Ce dont j’ai besoin, c’est…  Si j’obtiens ce dont besoin, je me sentirai. …

Quatrième étape : nourrir le démon et rencontrer l’allié 

Nourrir le démon : Reprenez votre place initiale en face du démon. Prenez le temps de réintégrer votre propre corps avant d’imaginer une nouvelle fois le démon en face de vous.
Imaginez que votre corps se dissout en un “nectar” fait de ce que le démon vous a dit qu’il éprouverait s’il obtenait ce dont il a besoin : c’est la réponse à la troisième question de l’étape. Nourrissez le démon jusqu’à ce qu’il soit pleinement satisfait, en imaginant qu’il absorbe le “nectar” à sa manière. S’il est insatiable, imaginez à quoi il ressemblerait s’il était pleinement satisfait. Puis passez directement à la cinquième étape ou rencontrez votre allié. 

Rencontrer l’allié ; Si une figure remplace le démon à la fin de la quatrième étape, demandez-lui si elle est ou non l’alliée. Si elle ne l’est pas, invitez un allié à apparaitre. Si le démon s’est complètement évaporé sans qu’aucune figure n’apparaisse, invitez un allié à apparaître. Observez l’apparence de l’allié : son regard, sa taille, sa couleur.

Questioner l’allié : Posez à l’allié une ou les quatre questions suivantes : Comment m’aideras-tu ? Comment me protégeras-tu ?  Quel engagement prends-tu envers moi ? Comment puis-je avoir accès à toi ?

Adoptez la place du démon : Changez de place avec lui, devenez l’allié, puis, en parlant au nom de l’allié, répondez aux questions ci-dessous : Je t’aiderai en…. ; Je te protégerai en…. ; Je m’engage à…. ; Tu peux avoir accès à moi en…

Reprenez votre place initiale. Accordez-vous un moment pour sentir que vous recevez l’aide et la protection de l’allié ! Puis imaginez la dissolution de l’allié en vous.

Cinquième étape : se reposer dans un état de conscience détendue

Reposez-vous dans l’état qui a cours quand l’allié se dissout en vous. Laissez votre esprit se détendre sans créer d’expérience particulière. Reposez-vous aussi longtemps que vous le voulez.

Jean Luc Monsempès

NB : ces techiques ont avant tout des applications thérapeutiques et ne sont pas enseignées dans le cadre des formations de l’Institut Repère

Sources : (1) Tsultrim Allione « Nourrir ses démons. Utilisez la sagesse ancienne pour résoudre vos conflits intérieurs » Editions Le jour 2009; (2) Robert Dilts : Encyclopedia of Systemic Neuro-Linguistic Programming and NLP

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