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Thierry Chavel*

La transition de carrière peut constituer un véritable choc pour les hauts potentiels : habitués à réussir, ils sont souvent très fragiles et ne parviennent pas toujours à gérer cette période et les bouleversements qui l’accompagnent. Lors des transitions de carrière, le coaching peut être d’un grand secours : notamment, il permet aux hauts potentiels de prendre conscience de leurs faiblesses, de leurs véritables qualités voire de leur « humanité » que leur statut et leur parcours ont parfois occultée.

Introduction

La sophistication des outils de gestion de la performance individuelle amène la tentation de sécuriser les parcours de carrière avec des éléments matériels, mais aussi immatériels (stages personnalisés, coaching…). Ces éléments immatériels jouent un rôle significatif avec les hauts potentiels, qui sont particulièrement exposés et fragiles.

Souvent, les hauts potentiels ne sont pas préparés aux transitions de vie. Les déraillements de carrière peuvent être parfois un « merveilleux malheur » : ils peuvent être salutaires et initiatiques, voire être un chemin d’humilité. De notre point de vue, les déraillements de carrière sont en fait une bonne nouvelle si, et seulement s’ils sont accompagnés par des actions de coaching.

Les enjeux du coaching de transition de carrière

Un bouleversement des repères

L’accompagnement des transitions de carrière se situe souvent entre l’aide et l’électrochoc. Les parcours de carrière subissent de plus en plus des turbulences et obéissent de plus en plus à des logiques de court terme. Le cadre de travail se morcelle, ce qui crée au final des risques et des incertitudes alors même que les exigences vis-à-vis des individus sont plus fortes qu’auparavant. La crise de la représentation et de la notion même de performance accroît les turbulences : la standardisation des process RH, l’usage de l’intelligence artificielle et la multiplication de « key performance indicators » qui évaluent les compétences comportementales. Il y a plus généralement une perte de sens commun, l’individualisation fabriquant des logiques de carrière utilitaristes et matérialistes : dans l’« entreprise de soi », on attend des hauts potentiels qu’ils gèrent leur carrière comme une entreprise.

Hélas, le coaching de transition de carrière accompagne les collaborateurs juste avant, juste après voire pendant un burn out. Il est à noter que les dispositifs d’accompagnement RH des hauts potentiels sont souvent paradoxaux, car ils ne permettent pas d’anticiper les transitions de carrière. Les coaches de hauts potentiels servent souvent à pallier les lacunes des dispositifs RH, les entreprises préférant parfois, dans un souci de facilité, externaliser la gestion des risques psycho-sociaux.

Qu’attendre du coaching de transition de carrière ?

Il peut être tout d’abord un accélérateur de changement. Il peut accélérer la prise de conscience de l’existence d’un « nouveau monde », mais le coaching n’est pas, et ne peut pas, être soumis à une obligation de résultats. Ce coaching a des fonctions curative et cathartique, et constitue souvent l’antichambre d’un développement personnel, voire d’un soutien psychologique de nature médicale. En revanche, il n’est guère crédible comme outil d’évangélisation des cadres à états d’âme. L’usage ad nauseam du concept de résilience en développement des compétences est, à cet égard, édifiant : ce qui ne tue pas… fait très mal, et ne rend pas toujours et tout le monde plus fort.

Les besoins des hauts potentiels en transition de carrière

Le statut même de haut potentiel fabrique une catégorie de personnes à la fois fragiles et conformes, qui dissimule des situations de vie très différentes les unes des autres. Les hauts potentiels ont été formés à l’aune des sciences dures, dans lesquelles il y a souvent déni des affects. Les émotions n’ont pas droit de cité dans les grandes écoles – elles ne l’ont pas plus dans les entreprises et les fonctions qu’ils rejoignent. Par ailleurs, les approches instrumentales de gestion du stress et du temps ignorent encore plus l’altérité des individus, partant du principe que ces questions peuvent faire l’objet de réponses univoques, applicables à chacun. Il est à noter également que les femmes hauts potentiels sont beaucoup plus sensibles à l’existence et la réalité des transitions de carrière que les hommes. Tous ont en revanche le sentiment d’appartenir à un corps d’élite qui les protège.

Les hauts potentiels franchissent traditionnellement, trois étapes au cours de leur carrière. Le coaching de transition de carrière prend donc différentes formes selon l’âge des hauts potentiels.

  • à 30 ans, ils sont absorbés par le FAIRE : faire des études, faire ses preuves, faire carrière, … faire avec ;
  • à 40 ans, ils sont occupés à AVOIR : avoir un patrimoine, avoir une famille, avoir un statut, … en avoir ou pas ;
  • à 50 ans, ils sont rattrapés par l’ÊTRE : être associé à la gouvernance, être un mentor, être hands-off, … être sur le départ.

Ces temps de vie, qui ont eu cours pendant longtemps, sont aujourd’hui bousculés. Ils étaient auparavant ritualisés et repérables au sein de parcours de carrière, dans un espace symbolique qui tend à s’effacer au nom de l’accélération des cycles économiques : qui bénéficie encore d’un livret d’accueil à l’embauche ? Que deviennent les déjeuners d’équipe quand celles-ci travaillent en phygital ? Quand avez-vous fêté une médaille du travail pour la dernière fois ?

Les hauts potentiels doivent maintenant choisir entre les figures tragiques de Narcisse et d’Icare. La starification des élites est telle que certains hauts potentiels éprouvent un sentiment d’imposture, considérant qu’ils ne méritent pas ce qu’ils ont. La frontière entre les domaines professionnel et personnel s’estompe, tout particulièrement pour les hauts potentiels qui sont de plus en plus exposés à la gestion de leur image, de surcroît de plus en plus jeunes : ils ne sont pas préparés à faire face à cette nouvelle donne, et les politiques de diversité et inclusion accroissent la pression d’exemplarité. Les hauts potentiels sont, d’une certaine manière, les symboles de la société de « l’adulescence » qui exige conjointement sens, intensité, plaisir immédiat.

Comment apprendre à échouer ?

Quelles pistes ?

Cinq pistes peuvent être adoptées.

  • en amont, se sensibiliser à la notion même de trou d’air professionnel ;

  • organiser des rendez-vous de carrière au fil de l’eau, sans enjeu d’évaluation ;

  • apprendre à s’écouter avec bienveillance, gérer la récupération entre deux épreuves ;

  • demander à ses mentors leur retour d’expérience sur leurs contre-performances ;

  • et surtout banaliser la dualité de réussites et d’échec, constitutives de la vie professionnelle.

La transition de carrière, une divine surprise ?

No mountains without valleys dit-on outre Atlantique. Un incident de parcours rappelle que la carrière n’est pas un processus linéaire de croissance. Plus précisément, il s’agit pour eux d’« apprendre à désapprendre ». Une éthique du dénuement peut être promue, dans la mesure où les hauts potentiels vont apprendre à lâcher prise et se préparer à cette échéance. Alors, les leaders ont l’opportunité de faire de la fragilité et de la modestie des valeurs positives. Or, il n’est pas toujours aisé de rompre avec le « syndrome du hamster », donc sortir du déni de l’échec potentiel en repérant qu’ils entretiennent parfois eux-mêmes une escalade de pression professionnelle. De surcroît, s’ils acceptent mieux leur fragilité, les périodes de chômage ou d’entre-deux seront mieux anticipées et vécues. Les moteurs des leaders sont davantage leurs failles que leurs trophées : encore faut-il qu’ils le reconnaissent comme un trésor d’humanité, non pas comme un défaut à corriger.

Comment coacher quelqu’un dans ce moment critique ? Trois principes peuvent s’appliquer :

  • adopter une position basse, en suspension de jugement et bienveillante ;

  • s’assurer de la sécurité du cadre, en termes de confidentialité et de libre parole ;

  • surveiller et encourager les aides thérapeutiques complémentaires.

Au final, le coaching des transitions de carrière porte une promesse simple : faire de l’acceptation de l’échec un principe de management. Sous ces auspices, vivent les temps morts dans la carrière des HiPo !

*Thierry Chavel est coach de dirigeants depuis 25 ans, également superviseur et auteur d’une douzaine d’ouvrages sur le développement professionnel. Il anime le Master 2 Coaching qu’il a co-créé en 2003 à l’université de Paris Panthéon Assas

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