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par Robert Dilts

Robert Dilts NetBLa théorie de l’auto-organisation est une branche de la théorie des systèmes qui concerne le processus de formation d’un ordre au sein des systèmes dynamiques complexes. Tirant ses origines des champs de la cybernétique et de la psychologie de la gestalt, la théorie de l’auto organisation propose un nouveau paradigme de la perception et du changement. De nombreux développements, parmi les plus récents et les plus significatifs de la théorie de l’auto organisation (en particulier ceux liées à la psychologie appliquée), ont été lancés par le Dr. Peter Kruse de l’université de Brême, en Allemagne.

Paradoxalement, la théorie de l’auto organisation tient ses sources de l’étude du chaos. Les scientifiques qui étudient le chaos (l’absence d’ordre) ont noté que lorsqu’un nombre suffisant d’éléments interactifs était rassemblé, plutôt que de créer du chaos, un ordre semblait se former spontanément comme résultante des interactions. Par exemple, dans notre système nerveux, les processus d’auto organisation sont considérés comme le résultat de connexions associatives massives entre nos cellules nerveuses. On pense que ces associations sont établies et conçues selon la règle de « Hebb ». Hebb, un neurologue prix Nobel, a découvert que si deux neurones interconnectés dans un état similaire, répondent de façon simultanée, leur connexion était renforcée. Autrement dit, la solidité des connexions associatives entre les parties de notre cerveau et le système nerveux repose plus sur une « relation » courtoise entre les cellules nerveuses, que sur les “sentiers battus” de la force physique. [La règle de Hebb peut même être à la source de la stratégie de base de la PNL pour établir le rapport, et qui consiste à « refléter » des schémas comportementaux ou cognitifs de l’autre personne.]

Plutôt que d’être dirigés de façon robotique par des « stimulus » externes qui produisent des réactions « stupides », des réactions irréfléchies (comme dans les modèles de Pavlov, Skiner et des Behavioristes), les systèmes auto-organisés organisent leurs propres comportements en fonction d’un certain point de focalisation de leur environnement. Dans un système d’éléments interconnectés, et selon la théorie de « l’auto-organisation », l’ordre apparaît autour de ce qu’on appelle des « attracteurs », qui aident à la création et au maintien de schémas stables dans le système. Ces attracteurs forment un genre de « paysage » qui façonne et détermine les schémas d’interaction au sein du système. La figure 1 montre un paysage simple fait de deux « attracteurs », représenté sous forme de deux vallées ou « bassins ». Si on imagine que la balle du dessin puisse se déplacer au-dessus du paysage, il est aisé de visualiser comment le fond des vallées peut constituer un endroit très stable pour la balle. La crête sur laquelle la balle se pose, serait cependant un lieu très instable. Pour déplacer la boule d’une vallée à une autre, il faut beaucoup plus d’énergie lorsque la boule est au fond de la vallée que si elle est en position d’instabilité.

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Figure 1 : le “paysage” des attracteurs

Par de nombreux aspects, la structure mentale et émotionnelle de notre vie pourrait être considérée comme un paysage. Par exemple, les “attracteurs” perceptuels vont constituer le point de focalisation d’un événement autour duquel le reste de nos perceptions s’organisent. Regardez le « stimulus » de la figure 2. Est-ce une image d’une jeune femme portant un collier ou de femme âgée avec sa tête baissée ?

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Figure 2 : le “paysage” des attracteurs de l’image ci-dessus

Naturellement, l’image elle-même est simplement une association ou un « paysage » complexe de lignes et de zones claires et foncées. La femme, jeune ou âgée, n’est pas vraiment sur le papier, mais plutôt dans nos esprits. Nous « voyons » une « jeune » ou « vieille » femme en  fonction des postulats de base et des structures profondes présentes au sein de notre propre système nerveux – ce à quoi Aristote se référait en parlant de « cause formelle. » Pour se déplacer entre les « images » du « paysage », nous avons besoin d’abord de déstabiliser l’attention organisée par un attracteur, puis de restabiliser ou « fixer » notre attention autour d’un nouvel attracteur.

Quelques autres exemples de « l’attracteur -paysage », figurent sur les schémas 3 et 4. Le premier groupe montre le visage d’un homme se transformant en corps de femme. Aux extrémités les deux images sont claires et « stables ». Les images intermédiaires deviennent progressivement plus ambiguës. Au centre, il est plus difficile de “fixer” une image particulière.
A nouveau, l’expérience du « visage de l’homme » ou du « corps de la femme » n’est pas liée aux traces du papier mais à ce qui est présent dans notre propre système nerveux (une abeille ou un chien ne seraient pas susceptible d’identifier l’une ou l’autre image).

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Figure 3 : Le visage d’un homme ou du corps d’une femme ?

Le schéma 4 montre une transformation entre les mots « endure» et « change », entre deux « attracteurs » verbaux.

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Figure 4 : “Endure” ou “Change ?”

Naturellement, les « attracteurs » ne constituent pas seulement un phénomène perceptuel. Ils se produisent également sous d’autres aspects. Par exemple, le mécanisme neurologique par lequel nous pouvons édifier différentes « parties » de nous-mêmes au sein du même système nerveux, est un processus identique. Par analogie, les images féminines précédentes seraient comme les deux « parties » d’une personne. Dans certaines circonstances, le système nerveux d’une personne a pu s’auto-organiser pour introduire une partie « plus jeune » au premier plan. Dans d’autres situations, la partie « plus ancienne » a pu être au premier plan.

La notion PNL « d’empreinte » est également tout à fait proche de celle de « l’attracteur ». Naturellement, dans les systèmes auto-organisés, la « force » de « l’attraction » ne vient pas réellement de l’objet ou de l’événement en dehors du système, mais elle est plutôt le résultat de l’interaction entre le système et son environnement.  « L’ attracteur » est simplement un point de référence externe autour duquel le reste du système organise son activité. Par exemple, pour un caneton sorti de l’oeuf, le « mouvement » est l’attracteur initial autour duquel le système nerveux du caneton commence à former le reste de sa représentation ou « empreinte » de « mère ».
Selon la théorie de l’auto-organisation, des états internes (des états problème ou des états d’excellence) seraient des schémas de choix dans l’organisation du système nerveux de l’individu. Ils pourraient « s’auto-organiser » et se maintenir sous certaines conditions.

Certains aspects de l’événement dans lesquels ces états se sont produits pour la première fois, pourraient devenir des ancres ou des « attracteurs » autour desquels l’état s’auto-organiserait spontanément et se reproduirait plus tard. Ainsi, les événements et les « empreintes » fonctionnent comme des « attracteurs » initiaux pour nos futurs modèles du monde ;  extrayant et rassemblant des expériences de notre mémoire. Ces ensembles de représentations deviennent alors eux même des « attracteurs » pour le prochain niveau d’organisation.

Dans la théorie de l’auto-organisation, la « force » d’un attracteur est décrite par la « profondeur » et la « largeur » de son « bassin ». La « profondeur » du bassin est reliée à l’intensité de l’attraction. La « largeur » du bassin est reliée au degré de facilité d’accès à cet état spécifique dans différentes situations. Par exemple, certains de nos états peuvent être très intenses et puissants, mais présents que dans un nombre restreint de circonstances spéciales – comme les moments d’inspiration qui sont intenses mais très espacés. D’autres états peuvent être relativement faibles, mais présents dans de nombreuses circonstances -par exemple les brefs moments d’irritation ou de doute, qui peuvent survenir dans différentes situations mais qui sont facilement surmontés.

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Figure 5 : l’influence d’un attracteur est défini par sa profondeur et la largeur de son bassin

Ainsi, un bassin qui est «profond » mais « étroit » correspondrait à un état intense expérimenté de façon occasionnelle. Un bassin « peu profond » mais « large » serait comme un état peu intense que nous pourrions expérimenter dans de nombreuses et différentes situations. Un bassin « peu profond » et étroit représenterait un état très bref et peu intense, et rarement expérimenté. Un bassin « profond » et « large » serait un  état intense et facilement vécu un nombre varié de circonstances.

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Figure 6 : différents types d’états peuvent être représentés par différents bassins

Le « paysage des attracteurs” de nos propres vies serait fonction, selon un certain degré, de l’influence de nos histoires personnelles. Par exemple, une personne qui a éprouvé un événement traumatique, mais dans une circonstance inhabituelle, pourrait développer une réaction très intense (un bassin profond), mais uniquement dans des circonstances très spécifiques (une faible largeur). Par exemple la phobie de traverser un pont spécifique. Une personne qui a vécu une expérience effrayante dans une situation plus commune pourrait aussi avoir une réaction intense, et l’éprouver plus souvent et dans de plus nombreux contextes (son bassin est « plus large »). L’exemple serait celui d’une personne qui aurait quelque chose ressemblant à une agoraphobie (la crainte de sortir).
Réaliser une « métacognition » ou une « méta position » par rapport à des expériences anciennes difficiles, pourrait être conçu comme une aide à l’élargissement du « bassin attracteur » de ces expériences spécifiques. (Accessible à notre conscience dans des circonstances plus nombreuses) mais également à la rendre  « moins profonde » (diminuant les réactions émotionnelles associées à l’expérience).

Avec la métaphore du « paysage », les processus de changement pourraient être envisagés d’une ou de deux façons ; 1) à un niveau de surface ou 2) à un niveau de changements profonds. Le changement de « surface » impliquerait de déplacer la balle vers une autre partie du paysage ; mais laissant le paysage inchangé. Tenter d’ignorer un mauvais ressenti et rester optimiste serait un exemple de déplacement de la balle de notre « conscience » vers une partie différente de notre paysage mental ou émotionnel. Changer au niveau de la « structure profonde » impliquerait de modifier le paysage lui-même en modifiant réellement les « attracteurs » ou le bassin des attracteurs. Trouver la source d’un ressenti inconfortable et le transformer par un « reimprinting », serait un exemple de ce niveau de changement.

Le processus de base du changement profond d’un système auto organisé implique d’abord « de déstabiliser » les attracteurs existants qui maintiennent le système dans son état actuel, puis de présenter ou activer un nouvel attracteur qui modifiera le « paysage » du système. On considère, avec  la théorie de l’auto organisation, que le changement de paysage est produit ou « dévoilé » par un processus “d’itération ». C’est parce que les systèmes auto-organisés tendent à impacter leur environnement en essayant continuellement d’exprimer leurs propres structures profondes internes. De cette perspective, les solutions aux problèmes émergent organiquement pendant les cycles successifs de l’itération – semblable à la notion de Freud « de la correction associative. » par exemple, une forte représentation d’un but, peut être un « attracteur » pour de possibles ressources ou solutions (sous forme de boucle de T.O.T.E.). Chaque étape du processus de réalisation de ce but constitue une autre « itération », qui se construit sur la précédente, jusqu’à ce que le produit final soit réalisé ; tout comme la croissance biologique de la nature ou celle d’une fractale mathématique.

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Figure 7 : dans un système auto organisé, le processus de base du changement implique d’abord de  stabiliser l’attracteur existant qui maintient le système dans son état actuel, puis d’introduire ou d’activer un nouvel attracteur qui va modifier le paysage du système.

On considère avec la PNL, que le phénomène de « l’attracteur » se produit  en lien avec les « submodalités » des divers systèmes sensoriels de représentation. Les caractéristiques des submodalités d’une expérience déterminent grandement le type et le degré d’affect que l’expérience aura pour une personne. En d’autres termes, ce n’est pas seulement le contenu d’une expérience ou d’une mémoire particulière qui déterminera la réponse d’une personne, mais aussi les caractéristiques formelles de la représentation de cette expérience. La même image, par exemple, peut être vécue comme attrayante ou repoussante selon certaines caractéristiques des submodalités. Une image attrayante d’une tranche de gâteau au chocolat peut sembler moins alléchante si la couleur du gâteau est soudainement changée en vert.

Un autre exemple est celui du processus de guérison du cancer de ma mère, au cours duquel une image survenait dans son esprit, sous forme de créature habillée en noir au regard démoniaque, qui la menaçait, la rendait pleine de doutes et d’effroi. Elle a tenté de bloquer l’image et de la mettre hors de son esprit ; mais elle revenait. C’était comme si cette image était devenue un « attracteur » pour ses craintes et ses doutes. (Dans la métaphore d’un « paysage », cette créature était comme un trou ou un fossé le long du chemin de guérison. Elle essayait de faire rouler la balle hors du centre du bassin, mais dès qu’elle cessait de faire des efforts, la balle roulait à nouveau au fond.

Plutôt que de retenir l’image dehors, j’ai invité ma mère à explorer les buts positifs de la crainte et du doute. Elle s’est rendue compte que l’intention positive des deux était de la protéger et de s’assurer qu’elle prenait bien soin d’elle-même. Après avoir compris et reconnu ces intentions nous avons décidé d’utiliser un « attracteur » plus approprié. Plutôt que de simplement essayer de faire partir le vieil attracteur,  nous avons adopté une stratégie « d’accompagnement et de guidage  ». Je lui ai demandé la première fois de juste rendre l’image de la figure démoniaque légèrement plus petite. Elle a pu le faire cela et après l’avoir fait, l’affect a diminué. J’ai lui ai alors demandé si elle pouvait rendre l’image bidimensionnelle – sans changer le contenu de l’image, mais la rendre simplement bidimensionnelle. Elle a pu également faire cela, ce qui a diminué encore plus le ressenti négatif. J’ai alors demandé si elle pouvait mettre un cadre autours elle. Enfin j’ai demandé si elle pouvait changer sa couleur. Elle a imaginé la figure dans une tenue d’un jaune lumineux. A ce moment l’image de la créature lui était devenue si risible et inoffensive qu’elle a juste semblé disparaître d’elle même, pour ne jamais revenir. A la place de cette créature ma mère a décidé d’insérer l’image d’un « ange gardien ». Pour rendre l’image de cet ange, puissante et « attrayante », elle a rendu l’image plus grande, tridimensionnelle, lumineuse et rayonnante dans la lumière. Cette nouvelle image satisfaisait également l’intention positive de ma mère, la protection et l’assurance qu’elle prenait soin d’elle-même, mais le ressenti était bien sur tout à fait différent.

Un autre exemple est celui du fameux traitement PNL de la phobie, qui implique essentiellement la déstabilisation des représentations mentales qui sont à la base de la réponse phobique. Une des versions de la technique PNL des phobies nécessite de trouver « le film mental » lié à la réponse phobique et puis de le changer en « noir et blanc » et de le faire bouger en marche arrière. Ceci déstabilise souvent la rigidité de l’association phobique, suffisamment pour quelle devienne ouverte à des « corrections associatives » et quelle puisse atteindre spontanément un nouvel état d’équilibre.

Des processus proches, comme la technique de l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Repatterning) pour traiter le stress post-traumatique, impliquent aussi essentiellement l’interruption des schémas  fortement stables car bloqués, « étranglés » ou « congelés ». Le processus de l’EMDR, fait applel par exemple au mouvement rapide et dans les deux sens, des yeux d’une personne, tout en pensant à un événement effrayant ou traumatique. Le mouvement des yeux  « brouille » ou déstabilise la représentation. Comme la personne dispose d’autres ressources, cette déstabilisation mènera souvent « à la correction associative » sans autres interventions de la part de l’accompagnateur.

Conclusion

La théorie de l’auto-organisation offre une alternative puissante et revigorante aux vues « mécanistes » typiques du comportement humain que proposent le Behaviorisme et de nombreux aspects de la PNL. La métaphore du « paysage » fournit également une explication plus systémique et plus naturelle au fonctionnement des techniques PNL (voir les Stratégies of Genious Volume III). Les principes de l’auto-organisation fournissent également une riche source pour des applications plus génératives et plus écologiques de la PNL en plaçant la source et la puissance de guérison et de changement chez l’individu (plutôt qu’en dehors de l’individu).

Pour plus d’information sur l’Auto-Organisation :

– Synergetics of Cognition, de H. Haken et de M. Stadler (Ed.), Springer-Verlag, Berlin, Allemagne, 1989.
– La théorie de l’auto-organisation rencontre la PNL(vidéo), R. Dilts et P. Kruse, NIK, Ausser der Scheifmuhle 67, 28203 Brême, Allemagne, 1994 (fax : 49-421-33 55 843).
– Cet article inclut le matériel extrait des stratégies du volume III de génie, par Robert Dilts, publications de méta, Capitola, CA, 1995.]

Article publié avec l’aimable autorisation de son auteur.
Pour plus d’informations sur Robert Dilts et les formations proposées par NLPU, voir le site de nlpu, ou formations de Robert Dilts,

Cette page, et tout le contenu, sont le © 1998 de copyright par Robert Dilts., Santa Cruz, CA.

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